La 5ème édition du Festival Maloba, un festival international de théâtre, de danse et de cirque, s’est tenue du 29 avril au 6 mai 2023, dans différentes salles à Brazzaville. Pays, invité d’honneur, la Colombie était représentée par la Compagnie Sankofa Danzafro. Regroupant plus d’une cinquantaine d’artistes et cumulant 26 ans d’expériences, cette compagnie est venue à Brazzaville avec le soutien financier de l’Ambassade de Colombie au Kenya, sans oublier le Ministère colombien de la culture. Chorégraphe et fondateur de la compagnie, Rafael Palacios s’est dit heureux d’être venu à la 5ème édition du Festival Maloba et de voir que la culture de son pays, la Colombie, n’est pas loin de la culture congolaise. Dans l’interview qu’il nous a accordée, il souligne que «la danse et la gestuelle, les instruments et la façon de jouer ont une même origine: l’Afrique». «Nous sommes vraiment chez nous», constate-t-il. Interview.
* Pouvez-vous présentez aux lecteurs?
** Je suis Rafael Palacios, fondateur et chorégraphe de la compagnie Sankofa Danzafro de la Colombie. Nous sommes à Brazzaville dans le cadre du Festival Maloba. Et c’est le gouvernement de mon pays, dans une stratégie de faire la promotion de la culture colombienne jusqu’en 2026, qui nous a permis de venir à Brazzaville, dans le cadre de la coopération Sud-Sud et de la promotion des relations économiques et culturelles entre la Colombie d’une part, le Kenya et le Congo d’autre part.
Nous sommes des danseurs. Dans ce cadre, nous exportons la danse afro-colombienne, afin de promouvoir la coopération Sud-Sud et faire connaître la culture de notre pays dans toute sa diversité, pour l’instant au Congo et ensuite au Kenya, afin de lutter pour les meilleures conditions de vie des Afro-colombiens. Lorsque nous sommes arrivés ici, nous avons compris que nous étions chez nous et, donc, il nous faut renforcer nos liens d’abord culturellement, ensuite économiquement.
* Vous êtes les ambassadeurs de votre culture en Afrique, vous constatez que votre culture n’est pas loin de celle du pays où vous vous produisez?
** C’est le début d’une reconnaissance. Je pense que l’esclavage a été un moment pénible de l’histoire de l’humanité. Notre présence ici, c’est une façon, pour nous, de reconnaître que nous, les habitants noirs de la Colombie, sommes venus d’Afrique et nos racines sont vraiment sur ce continent. Alors, la danse que nous faisons est finalement proche des danses congolaises. Elle nous permet de ne pas oublier d’où nous venons.
* Parlez-nous de votre danse et des instruments qui l’accompagnent.
** Nous avons d’autres instruments de musique que vous. Les maracasses et les tambours que nous utilisons ne sont pas ceux que nous voyons ici. Mais, le son qu’ils produisent et la manière de les jouer restent les mêmes. Il y a d’autres façons de communiquer et de rappeler notre spiritualité. Il faut indiquer que la trame du chant est la même en Colombie comme au Congo. Nous sommes en train d’exalter une procédure de combinaison de son et de musique africaine et celle de la diaspora. Parce qu’il faut nous considérer comme une diaspora d’Afrique vivant en Amérique latine.
* Cinq pays, dont l’Espagne, sont présents à ce festival. En dehors des similitudes en danses et gestuelles, qu’est-ce qui fait la particularité de votre groupe?
** Nous sommes latino-américains. Donc, nous avons notre façon de faire et cette manière de faire, cette joie de la danse, nous la partageons avec nos frères et sœurs congolais. Par exemple, en peu de temps, nous nous sommes associés avec un groupe local, pour prester ensemble. Nous avons appris d’eux et eux, ils ont appris de nous. D’ailleurs, nous avons trouvé quelques pas qui se ressemblent. Pour nous, c’est la même chose: la façon de bouger, de battre les mains et de regarder la vie. Nous, les Colombiens, Noirs, nous sommes conscients que nous sommes partis d’Afrique. Pour cela, nous sommes en relation avec la nature et nous gardons quelques éléments que nous puisons dans la nature.
* Qu’est qui a fait frémir le public, lorsque vous êtes montés sur scène?
** Je pense que le public congolais a retrouvé des frères et des sœurs, même si nous venons d’Amérique latine. Lorsque nous dansons la salsa ou une autre danse, puisque c’est notre tradition, rapidement, on est connecté. Le public congolais était en communion avec nous. Il n’était pas étranger à notre danse. Bien au contraire, il a bougé et la relation s’est établie.
* On peut dire que le pont vient d’être établi par le Festival Maloba, quels sont les projets pour l’Afrique, à travers le Congo et le Kenya?
** Nous aimerions amener les artistes congolais en Colombie. Ils vont découvrir qu’ils seront chez eux, comme nous ici, et partager la culture congolaise avec notre population, pour que les Colombiens connaissent l’immensité de notre culture et mettre en avant la coopération Sud-Sud, et permettre une construction culturelle et une éducation solide.
* Une dernière préoccupation? Le public de Brazzaville était chaleureux et attachant, n’est-ce pas?
** Nous avons fait deux jours pour arriver à Brazzaville. Par notre présence, le public congolais a connu la Colombie et nous avons senti que les Congolais sont fiers de savoir qu’ils ont des frères et sœurs en Amérique latine, qui dansent comme eux. Notre gouvernement encourage la coopération Sud-Sud. C’est dans ce cadre que nous sommes ici. D’ailleurs, depuis le 7 août 2022, notre Vice-Présidente de la République, Mme Francia Elena Márquez Mina, née le 1er décembre 1981, est Afro-colombienne.
Propos recueillis par
Chrysostome
FOUCK ZONAZEKA