Ainsi donc, nous avons raison de revenir souvent sur ces questions qui concernent la lutte contre la corruption et les anti-valeurs. Il y a des compatriotes qui trouvent cela rébarbatif, quand ils ne nous taxent pas d’empêcheurs de tourner en rond, c’est-à-dire de trouble-fêtes qui entravent le déroulement du festin, sous-entendu le festin de l’enrichissement sans cause. Quand un Etat aux ressources importantes comme le nôtre n’arrive plus à financer les secteurs sociaux comme la santé et l’éducation, c’est d’abord la gouvernance, c’est-à-dire, la façon de gérer qu’il faut regarder.
Les experts savent que les économies de rente comme la nôtre souffrent, parmi les principaux défauts, de générer une classe dirigeante bourgeoise dont le mode de vie est calqué sur les pays riches. Face aux enjeux du développement national, ils parlent alors de la «malédiction des ressources naturelles». Le terme «malédiction» est utilisé pour décrier le contraste entre les immenses revenus obtenus des rentes extractives (pétrole, mines, bois…) et la grande pauvreté ou la précarité de l’immense majorité des populations. Si les institutions nationales ne sont pas fortes (le parlement contrôle l’action du gouvernement), pour contrer la tendance des gouvernants à privilégier leurs intérêts personnels, le pays ne pourra pas échapper à la dilapidation d’une bonne partie de ses ressources financières, par les élites aux affaires.
La surestimation de la bourse annuelle des étudiants inscrits dans les universités publiques de Brazzaville et la dilapidation du surplus de cette bourse, soit un montant annuel de 6 milliards de francs Cfa révélé par le Chef de l’Etat lui-même, dans son récent message sur l’état de la Nation, est un exemple éloquent de «la malédiction des ressources naturelles». Il aura fallu que l’Etat soit en crise financière pour qu’enfin on découvre le pot-aux-roses. Autrement, tant que la manne pétrolière coulait à flot, l’Etat payait, sans difficulté, les 9 milliards de francs du montant de la bourse, chaque année, et 6 milliards allaient droit dans les poches de l’élite dirigeante. C’était pareil, avec le contrat d’Averda. Et ce ne sont là que des exemples dont on parle, au moment où il y a des grèves à la plus grande université publique, dans les hôpitaux, les mairies et dans certaines entreprises publiques.
Ce phénomène de dilapidation de fonds publics ne peut réussir en toute impunité qu’en impliquant des autorités de haut niveau, notamment des ministres, des directeurs généraux et peut-être des conseillers. La Haute autorité de lutte contre la corruption n’y voit que du feu. L’inspecteur général d’Etat peut instruire ces dossiers, en menant des enquêtes, mais ses résultats ne peuvent avoir des suites judiciaires que suivant la volonté du Président de la République lui-même.
De même, la C.i.d (Centrale d’intelligence et de documentation) fait son travail, avec diligence et pertinence. Mais, ce service, qui a démontré ses capacités à traquer la délinquance à col blanc dans les services publics, est souvent arrêté net dans son élan à présenter au parquet, les présumés auteurs de faits de détournements de fonds publics, comme celui évoqué par le Chef de l’Etat. On l’utilise volontiers pour réduire les opposants au silence, mais pas tellement pour protéger les deniers de l’Etat. D’où la mauvaise perception que les Congolais ont de ce service considéré à réprimer l’opposition, alors qu’il réalise la grande mission de sécurisation de l’intérêt général qu’incarne l’Etat.
C’est depuis son discours d’investiture d’août 2009, que le Président Denis Sassou-Nguesso avait voulu marquer la rupture d’avec les mauvais comportements, dans la gestion publique. «Je ne surprends personne en affirmant qu’en dépit de nos efforts multiformes, notre pays n’est pas encore, hélas, exempt de corruption, de concussion, de fraude, de détournement de deniers publics et d’autres actes tout autant répréhensibles que néfastes à l’accomplissement du bonheur collectif. Ici, ce sont les gouvernants qui sont interpellés. Qu’il soit clair pour tous que le peuple ne veut pas et ne doit pas être conduit sur le «Chemin d’avenir», par des dirigeants sans scrupule ni vertu. De même que le peuple ne veut plus et ne doit plus être mené par des hommes qui ne donnent pas le meilleur d’eux-mêmes pour le servir», avait-il déclaré.
L’officier général longtemps le plus haut-gradé de notre Force publique et le leader politique qui bat de loin le record de longévité à la tête de l’Etat qu’il est, avait alors pris la résolution de changer: «Je veillerai, donc, avec davantage de rigueur, à ce que les personnes que je nomme aux différentes fonctions d’État soient exemplaires et de bonne éthique, capables de faire respecter, au nom de l’autorité impartiale de l’État qu’elles incarnent, les lois et les règlements de notre pays. Tout manquement, toute faiblesse m’amènera à en tirer les conséquences».
En 2024, soit 15 ans après, le Président Denis Sassou-Nguesso en est encore à constater que les cadres qu’il nomme continuent de dilapider les deniers publics. Pour faire court, il y a lieu de souhaiter que l’Inspection générale d’Etat, la C.i.d, la Haute autorité de lutte contre la corruption, la Commission nationale de transparence, le parquet et la presse nationale soient appelés à aider le Chef de l’Etat et ses compatriotes à savoir où partaient les 6 milliards de surévaluation de la bourse annuelle des étudiants. A vos enquêtes!

L’HORIZON AFRICAIN

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