«L’histoire, dans tous les pays du monde, remplit une fonction individuelle et collective, c’est la fonction de la mémoire et je pense que cela vaut pour tous les peuples du monde». «Partout où il y a l’homme, il y a invention, il y a une problématique et une dynamique du progrès, donc il y a histoire au sens réel du terme» (Joseph Ki-Zerbo). (Suite du numéro précédent)

Les principales villes du Mali les plus riches, dont Djenné et Tombouctou, furent occupées, en 1345, par Sonni Ali, un des princes de Gao (un petit royaume vassal du Mali). Ce dernier bâtit, sur les ruines de l’empire du Mali, un immense empire très riche et bien administré qui prit le nom d’empire de Gao (ou empire Songhaï), ville à l’Est du Mali, situé sur le Niger. Érigée au rang de capitale de l’empire Songhaï au début du XIème siècle, la ville devint une escale majeure pour les caravanes transsahariennes faisant le commerce de l’or, du cuivre, des esclaves et du sel.
Malgré son appartenance à l’islam, le roi persécuta les chefs religieux et fit fermer les écoles coraniques. Son successeur, Askya Mohammed, fut un fervent musulman qui fit le pèlerinage à la Mecque. La conquête de l’empire de Songhaï eut de terribles conséquences pour tout le Soudan et toute l’Afrique de l’Ouest. Ce fut l’anarchie et le déclin, toutes les stratégies de préservation de sécurité et de paix mises en place par les puissants empereurs du Ghana, du Mali et de Gao volèrent en fumée. Ce fut le début de l’ère sombre de l’empire de Gao, de l’Afrique de l’Ouest, voire de l’Afrique toute entière. Toutefois, d’autres royaumes existèrent et s’illustrèrent tant dans les domaines politique, économique, artistique que culturel.
Le Royaume Mossi (dans l’espace du Burkina Faso actuel) créé à partir du XIème et XIIème siècle constitua un ensemble d’États bien organisés. Ces États animistes avaient une solide organisation politique, économique et religieuse, et constituaient un empire original et démocratique. Ils résistèrent à l’Islam et s’opposèrent à la traite esclavagiste. A l’Est (Nigéria actuel), les États haoussa développèrent une civilisation originale.
Le Royaume du Bénin fut fondé par les Edos, vers le Xème siècle. À l’apogée de l’âge d’or, aux XVIème et XVIIème siècles, le Bénin était un royaume tributaire régnant sur les Igbos de l’Ouest, les Yorubas de l’Est et les Itsekiris de la côte. La principale puissance commerciale de la côte nigériane correspondait, ainsi, à la partie du Nigéria située au Sud-Ouest du Fleuve du Niger, du Bénin actuel et d’une partie du Togo.
Oba Ewuare fut le premier roi à en transformer la destinée. Il est décrit comme un sage magicien, un médecin et un guerrier. Malgré les tentatives de conversion au christianisme par les Portugais, le roi resta fidèle à ses croyances traditionnelles. L’expansion des arts du Bénin reste l’un des principaux héritages d’Oba Ewuare. La promotion des arts par Ewuare a conduit à l’établissement d’une industrie artistique prospère, remarquable pour la production d’œuvres en ivoire, en bois et en bronze.
En fait, le commerce avec les Européens a commencé avec les Portugais en 1472, au fur et à mesure que le commerce atlantique se développait et se poursuivait uniquement avec des groupements de marchands approuvés par le royaume. Avec l’expansion du commerce atlantique des esclaves à la fin du XVIIème et au XVIIIème siècle, d’autres royaumes côtiers prirent le dessus sur le Bénin. Le Royaume du Bénin a duré du XIIème siècle à son invasion par l’Empire britannique en 1897. Ce qu’il faut retenir, c’est que ce royaume n’a aucune relation historique avec l’actuelle République du Bénin.
Abomey, capitale du Royaume du Dahomey, au Sud de l’actuel Bénin, prit forme au cours du XVIIème siècle. Elle connut un essor parallèle à celui de la traite négrière, dont elle sut pendant près de deux siècles tirer profil. Toutefois le royaume fut également célèbre grâce à une armée de guerrières plus fortes et plus vaillantes que les hommes, les «Minos» (nos mères en langue fon) communément appelés les «Amazones du Dahomey» par les Européens, en référence au mythe des femmes guerrières de l’antiquité. Au XVIIIe siècle, ces dernières représentaient l’unique armée de femmes au monde.
En Afrique équatoriale, les royaumes bantous par leur organisation et leurs cultures avaient fait l’admiration des voyageurs européens, en particulier les Portugais. Le Royaume du Kongo est sans doute le mieux connu des États de cette région, grâce aux récits des Portugais. Il couvrait, à son apogée, les territoires de l’Angola, de la RD Congo et de la République du Congo. Lukeni Lua Nimi devint le premier roi kongo et Mbanza Kongo, situé dans l’actuelle Angola, la capitale du royaume. A leur arrivée, les Portugais trouvèrent un royaume déjà bien structuré, doté d’une organisation et d’un patrimoine culturel. Au contact des Portugais, ses rois se convertirent au christianisme. Il fut l’un des royaumes africains les plus célèbres du XVème à la fin du XVIIème siècle. Alphonso 1er fut le premier souverain, il traitait d’égal à égal avec le roi du Portugal.
Le Royaume de Loango a d’abord existé comme l’une des provinces du Royaume Kongo. Toutefois, les Portugais arrivèrent à Loango en 1575, suivi des Hollandais, au début du XVIIème siècle. Ainsi la traite débuta en 1637. Le Port de Loango devint le lieu d’embarquement pour tous les esclaves venant d’une partie du «Golfe de Guinée», des zones qui correspondent actuellement au pays ci-après: Tchad, Angola, Sud du Gabon, RD Congo et République du Congo.
Toutefois, d’autres ports négriers ont existé tels que l’Île de Gorée (Sénégal), Ouidah (Bénin), Bimbia (Cameroun), Zanzibar (Tanzanie), etc. A cet effet, du XVème au XIXème siècle, des êtres humains furent déportés vers des colonies d’Amérique et de l’Océan indien, pour être réduits en esclave. En effet, ce sont les pays côtiers qui ont subi les ravages de l’esclavage. Les esclavagistes récupéraient des esclaves sur les côtes, pour les transférer dans de grands centres de traite: (Sénégal, Mauritanie, Gambie, Guinée, Libéria, Sierra Leone, Côte d’Ivoire, Ghana, Cameroun, Togo, Bénin, Nigéria, Angola, Gabon, Congo-Brazzaville).
L’Empire de Monomotapa était situé en Afrique australe, recouvrant les territoires des actuels Zimbabwe et Mozambique, au Sud du Zambèze. Il se développa sur le plateau où des sites comme Zimbabwe témoignent de l’essor de deux civilisations métallurgiques entre la fin du XIIème et le milieu du XVème siècle. Il doit sa prospérité également au commerce de l’or avec des marchands étrangers.
Il faut reconnaître qu’au cours de cette période, l’Océan indien joua un rôle primordial. A cet effet, des rapports étroits se développèrent sur toutes les côtes est de l’Afrique avec l’Orient. Ainsi, la Mer rouge et l’Océan indien furent des voies d’accès qui constituèrent des axes d’échanges importants entre l’Afrique et le monde arabe. Toutefois, depuis l’antiquité, la Mer rouge servait de lien entre l’Orient et l’Afrique. La côte orientale de l’Afrique devint un carrefour, une civilisation originale, faite d’influences diverses (arabes, musulmanes, malaises, indiennes, chinoises…) se développa du XIème au XVème siècle, autour des cités marchandes florissantes et actives. La population étant à majorité islamisée, la domination arabe y demeura prépondérante. Néanmoins, pour mieux s’assurer le monopole du commerce entre l’Afrique et l’Orient, les Portugais procédèrent à la destruction des prestigieuses cités marchandes.
Enfin, à travers cet article, nous avons passé en revue quelques royaumes et empires qui se sont illustrés sur le continent. Cette liste est non exhaustive. Concernant la traite négrière, l’Unesco a lancé, en 1994, à Ouidah, le Projet transatlantique «La route de l’esclave», inspiré de la route de la soie. Ce projet a permis la reconnaissance de la traite négrière et de l’esclavage comme «crime contre l’humanité», par la conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance, qui s’est tenue en 2001, à Durban, en Afrique du Sud. Ce même projet a aussi exhorté l’Onu à proclamer 2004 «Année internationale de la commémoration de la lutte contre l’esclavage et son abolition», à l’occasion du bicentenaire de la Révolution haïtienne.
Force est d’admettre que la population d’Alkebulan vivait, comme tous les autres peuples, avec son savoir-faire, sa culture, sa spiritualité, ses traditions, etc. En réalité, Alkebulan a connu un passé glorieux, n’eut été la traite négrière.
En dépit de tout, je voudrais m’adresser à vous, fils et filles d’Alkebulan, où que vous soyez, à travers le monde: «Wake up! Wake up!». L’heure n’est plus aux jérémiades. Alkebulan parle en chacun de nous. Conjuguons nos efforts, mettons-nous au travail, travaillons sans relâche, soyons ces dignes fils et filles d’Alkebulan, soyons ce peuple épris de paix, soyons nous-mêmes, soyons positifs, pratiquons l’Ubuntu. Alkebulan! Alkebulan! Wake up! Wake up! Renaîs de tes cendres.

Lydie Patricia ONDZIET

Présidente de l’Association
la Trinité;
Présidente de Renaissance Alkebulan;
Membre de l’Association
panafricaine d’Aquitaine;
Membre de la Plateforme des associations féminines de développement.

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