Considéré comme l’un des plus grands peintres modernes africains, Marcel Gotène est un peintre congolais qui a inspiré plusieurs légendes de notre pays. Décédé en février 2013, à Rabat, au Maroc, à l’âge de 74 ans, son art continue d’exercer une immense fascination, en dépit du temps qui passe. Cette année marque le dixième anniversaire de ce Picasso africain. Ainsi, une rétrospective de ses œuvres est présentée, jeudi 13 avril 2023, à l’I.f.c (Institut Français du Congo) de Brazzaville. En marge de cette commémoration, notre rédaction s’est rendue à l’Ecole de peinture de Poto-Poto où il a été formé, pour recueillir quelques témoignages sur le parcours de ce virtuose de l’art plastique africain.
Fondée en 1951 par le peintre français Pierre Lods, l’école de peinture de Poto-Poto est située au cœur de Brazzaville, dans le 4ème arrondissement, Moungali. Elle a fêté son 70ème anniversaire en 2021. C’est l’unique école de peinture dont dispose notre pays et qui s’est faite une grande renommée en dehors de nos frontières. A notre arrivé sur les lieux, nous avons été reçu par deux peintres formateurs. Il s’agit des artistes Jacques François Iloki et Cyrille Bokotaka. Au cours de nos échanges, nous avons évoqué le parcours de Marcel Gotène, l’art pictural congolais ainsi que l’école.
Pour Cyrille Bokotaka, artiste peintre au sein de cette l’école depuis 1983, «Marcel Gotène était un peintre talentueux. Malheureusement, il n’a formé personne à son tour. Il a été formé ici à l’Ecole de peinture de Poto-Poto. Dommage qu’il soit parti trop tôt, parce qu’on avait encore besoin de ses conseils. C’est lui qui nous a encouragé dans la peinture, parce qu’à l’époque, les jeunes ne s’y intéressaient pas. Gotène est une référence».
Abordé sur la qualité artistique des œuvres de Gotène, Cyrille Bokotaka a souligné que «la peinture, c’est d’abord le mélange des couleurs. Quand vous regardez les œuvres de Gotène, vous ressentez cette symbiose des couleurs. Ça montre la capacité de l’artiste à transmettre les messages spirituels, car les tableaux qui sortent de ses mains sont des œuvres de l’esprit».
Concernant la place de la peinture congolaise dans le monde commercial, Cyrille Bokotaka a souligné que «la peinture congolaise est connue à l’international, grâce à cette école. Ce n’est pas ce vieux bâtiment datant de l’époque coloniale, mais ce sont les œuvres réalisées par les peintres de toutes tendances qui parlent. J’ai passé deux mois en Chine, j’ai fait plus de quinze tableaux et tout a été pris. Ces œuvres ont été placées à l’Académie des Beaux-arts de Nahjing et J’ai les certificats. Nous sommes plus connus sur le plan international. Certains ont été aux Etats-Unis».
De son coté, Jacques François Iloki estime que le travail d’un artiste peintre revêt un caractère historique et éducatif. «Nous sommes en train de faire un travail pour les générations futures. Par exemple, il y a des tableaux où figure une femme portant un enfant au dos. Mais, peut être que dans cinquante ans, cette pratique ne sera plus d’actualité. C’est un travail de reportage qui tire son inspiration de notre culture», a-t-il déclaré sur le rôle de l’artiste peintre dans la société d’aujourd’hui.
Signalons que l’Ecole de peinture de Poto-Poto est presqu’à l’abandon. C’est un patrimoine culturel qui devrait bénéficier de l’attention du gouvernement, notamment du Ministère en charge de la culture, eu égard au rayonnement international de cet établissement. «Je crois qu’il faut mettre en valeur ce cadre. Il doit changer par rapport à sa célébrité. Pourquoi pas en faire une grande salle d’exposition où un musée?», interpelle Cyrille Bokotaka.
Roland KOULOUNGOU