A l’époque, on appelait courrier, l’homme qui transportait les lettres, les dépêches et autres journaux. On a connu aussi le courrier maritime et le courrier aérien. On connaît encore le courrier postal, même si le courrier électronique tend à le supplanter. Mais le courrier, c’est aussi la correspondance entre éphémères; et quand ces éphémères sont détenteurs d’une autorité administrative, on parle de courrier administratif ou correspondance administrative.
A l’époque, le courrier était bien protégé, même celui de l’administration. A l’époque, l’agent de l’Etat était soumis à un strict respect de la déontologie. A l’époque, la sanction était redoutée par tous les agents de l’Etat. Mais, tout ceci, c’est du passé. Les éphémères contemporains de céans ont pris des libertés avec les règles administratives de confidentialité. Et, comme le dit si bien Pierre Lucier, «les références coutumières craquent de toutes parts, celles des Églises, des sociétés civiles, des institutions, des familles, des associations, des individus» et surtout celles de l’administration.
Voilà! Le mal, ce ne sont pas les réseaux sociaux. Ils sont une trajectoire inéluctable du progrès humain. Nous devons apprendre à vivre avec eux. Il n’y a pas lieu de s’en prendre aux réseaux sociaux; il n’y a pas lieu de les incriminer. Il faut plutôt les réguler. C’est l’éphémère qui doit s’adapter à ce nouveau mode de communication. Mais, c’est à la société de renouer avec ses valeurs éthiques; c’est l’Etat qui doit remplir toutes ses fonctions régaliennes.
Parce qu’en réalité, les réseaux sociaux jouent le rôle d’une part, de révélateur des préférences et d’autre part, d’exutoire des frustrations. Il y a lieu de comprendre et d’admettre qu’aujourd’hui, l’espace et le débat publics sont numérisés. Quand un document administratif plastronne sur les réseaux sociaux, à l’instar du dernier, pour lequel on n’a même pas la précaution ou l’intelligence de dissimuler le cachet «courrier arrivée», le mal n’est pas les réseaux sociaux, il est dans la tête des éphémères. Le mal, c’est ce qui pousse les éphémères à transgresser les règles administratives.
Le mal, c’est le mécontentement ou le manque de formation ou les deux. En tout état de cause, ce qui se passe actuellement, avec l’étalage des documents administratifs sur la place publique, c’est peut-être un signal social, un appel à administrer autrement; ou un signal de détresse ou de désespoir; ou encore un signal politique. Il faut plutôt entendre ce signal et le gérer au mieux des intérêts des éphémères.
Prométhée