On dirait le refrain d’une chanson titrée «galère», le mois de janvier fait vivre un calvaire financier sans pareil à plusieurs Congolais, qui tirent souvent le diable par la queue. La faute au champagne sabré et aux tonnes de bières ingurgitées au-delà de leur bourse, les 25 décembre et le 1er janvier. Une vie de pacha durant les fêtes qui se paie cash en janvier.
Difficile traversée du mois de janvier 2024 pour certains Congolais. Aux cris de joie entendus comme des feux d’artifice, les 25 et 31 décembre, tout comme le 1er janvier; aux vœux de nouvel an souhaités mutuellement dans les rues, familles et milieux professionnels se mêlent désormais des inquiétudes financières. Si les villes de Brazzaville et de Pointe-Noire retrouvent le calme des jours ordinaires, après des nuits aux sons et rythmes de Roga-Roga, de Tidiane Mario, des Gangourains de Vinny Baltazard, de David Kassa, de l’afro-mbokalisation d’Afara Tsena ou encore des DJ Rox et Kratos, dans les chaudes rues et boîtes de nuit des quartiers de Ouenzé, Moungali, Poto-Poto et Bacongo, pour de nombreux Congolais, janvier est long comme un jour sans pain. Le début de la pénitence financière, dira-t-on. Le jeune forcé s’invite même dans certains ménages où la fête a fait vider les congélateurs de toutes provisions. A l’origine donc, ces investissements sans planification effectués pour célébrer le passage de 2023 à 2024. Des ambiances qui rappelleraient les grandes joies de Yaoundé 72 avec le sacre des Diables-Rouges alors champions d’Afrique (football).
La fête aura en tout cas été belle malgré la dureté des temps, nous l’avons constaté. Le virement des salaires avant Noël avait boosté le moral des Congolais. Achats des vêtements des enfants, des épouses, de nouveaux costumes pour des jours spéciaux, déjeuners et dîners dignes des grandes soirées avec toujours au menu: saka-saka, haricot, les très prisés cuisses de poulets ou quelques mets traditionnels…
Le 25 décembre tout comme la nuit de la Saint-Sylvestre ainsi que le jour de l’an ont été mouvementés chez les Congolais lambdas et chez les grandes personnalités. A la seule différence de voir les uns jouir de leurs prérogatives, pour ne pas crier famine en janvier et les autres investir une bonne partie de leurs ressources dans les festivités, pour après espérer invoquer un Moïse qui les sortira comme les enfants d’Israël de la captivité d’Égypte.
Qui sème le vent récolte la tempête
Le feu de la galère en ce mois de janvier consume plusieurs ménages, surtout à Pointe-Noire et Brazzaville, deux grandes agglomérations habituées aux grands rassemblements durant les périodes festives. C’est dans cette atmosphère dite de «gérons les provisions avant le virement attendu le 25 janvier 2024», que beaucoup se transmettent les vœux de nouvel an.
Les prières autrefois adressées au bon Dieu sont tournées pour certaines d’entre elles, vers le Président de la République et le ministre en charge des finances, Jean-Baptiste Ondaye, pour un virement qui sauverait les fonctionnaires de leur galère de janvier. Pas que. Dans le privé, les employés miseraient, également, sur le prêt d’un parent ou ami fonctionnaire, pour espérer tenir jusqu’à la fin du mois de janvier, car la période de la paie oscille entre le 31 et le 5, le 6 voire le 10 du prochain mois, selon les entreprises. La galère de janvier a même trouvé son petit nom dans les rues de Brazzaville: la janvoise. On dirait une maladie contagieuse comme ces grippes chroniques dont souffrent actuellement les Congolais.
Poussé par l’Esprit, Jésus de Nazareth, ceux qui ont célébré sa nativité le 25 décembre dernier s’en souviennent, s’est retiré dans le désert et a jeûné pendant quarante jours, tenté par le diable et servi par les anges. Mais, les Congolais, poussés par l’excès de table et l’envie de paraître à tout prix, ont mis toutes les finances ou presque dans les festivités, en comptant sur la manne tombée du ciel. Le pays est laïc, nous dira-t-on, porté donc par la foi de ses nombreux fils et filles. Pourquoi ne pas donc croire à un miracle financier en janvier?
Paradoxe
C’est un peu maintenant le chacun pour soi, Dieu pour tous qui doit à l’image des autorités rappeler aux citoyens congolais que la marche vers le développement de chaque ménage, ne se fera pas sans bonne gestion des «finances familiales» et planification en période d’euphorie. Comme on pense aux générations futures, il faut aussi savoir penser aux autres mois qui succèdent à Noël et au nouvel an. «Qui gouverne bien sa famille peut mieux gouverner un pays», pensent les analyses de la «janvoise». Les années passent et se ressemblent, les Congolais ne tirent malheureusement pas les leçons de ces festivités qui vident les caisses familiales pour imposer un jeûne forcé au mois de janvier.
Hordel Biakoro MALONGA