Commentaire
La convention d’affermage de E2c n’aura
pas son décret d’approbation
Le 13 février 2025, le ministre de l’énergie et de l’hydraulique, Emile Ouosso, signait, avec Papa Toby Gaye, directeur général de la Senelec (Société nationale d’électricité du Sénégal), la convention d’affermage au terme de laquelle la société sénégalaise va assurer la commercialisation de l’électricité au Congo, à travers une filiale, la Socelec (Société congolaise d’électricité). La cérémonie de signature s’était déroulée à la Primature, sous la supervision du Premier ministre chef du gouvernement, Anatole Collinet Makosso. En principe, après la signature de cette convention, il ne restait plus que la prise en conseil des ministres, d’un décret d’approbation du Président de la République, Denis Sassou-Nguesso, pour que la Socelec entre en activité, en lieu et place de E2c, dans la commercialisation de l’électricité au Congo. Mais, au terme de la session du Conseil des ministres tenue le 13 mai dernier, à Oyo, la convention d’affermage n’a pas été approuvée par le gouvernement et donc le décret ne suivra pas.
Lors de la session du Conseil des ministres du 13 mai dernier, le gouvernement a manifesté sa détermination à poursuivre «les réformes ainsi résolument engagées», «afin d’améliorer les performances du secteur de l’électricité, élément moteur dans le développement de notre pays». Mais, au terme d’un échange sur la convention d’affermage, des réserves ont été émises pour ne pas l’approuver, en raison de nombreuses clauses suspensives. Parmi ces clauses suspensives, il y a un procès en vue intenté, le 16 avril dernier, par le Cabinet «Africa finances and advisory» contre la Socelec, pour «escroquerie».
Par ailleurs, la Commission technique interministérielle mise en place par décret du Premier ministre, le 5 mars 2025, avec pour mission d’intégrer les désidératas des syndicalistes de E2c dans la convention d’affermage, n’a abouti à aucune conclusion. Les syndicalistes ayant changé d’attitude, en exigeant désormais, le rejet pur et simple de la convention d’affermage.
Au regard de tous ces faits, le Président Denis Sassou-Nguesso a renvoyé aux calendes grecques le décret d’approbation de la convention d’affermage. A la place, «le Conseil des ministres a réaffirmé l’urgence, pour le gouvernement, d’étudier les conditions d’amélioration du réseau de transport d’électricité entre les villes de Pointe-Noire et Brazzaville, afin de réduire puis d’éliminer les pertes techniques sur ce tronçon et d’améliorer ainsi la desserte, la quantité et la qualité de l’électricité en faveur des populations».
Pour les syndicats de E2c, qui avait infligé un carton rouge à la convention d’affermage, lors de leur manifestation du 21 février, c’est une victoire. Le syndicaliste Oko Engambé, qui s’est fondu d’un audio en langue mbochi, avant le Conseil des ministres du 13 mai, pour implorer le Président de la République de ne pas suivre les membres de son gouvernement dans cette aventure qui risque d’ébranler son pouvoir, c’est une victoire éclatante.
Mais, pour le gouvernement, il y a problème: comment faire entendre raison à la partie sénégalaise, que la convention d’affermage ne peut plus être mise en œuvre? La Senelec aurait versé un montant important (3 milliards de francs Cfa?) pour la signature de la convention d’affermage. Que va-t-il se passer? Le Président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a dépêché un émissaire auprès de son homologue congolais. Ainsi, le ministre sénégalais de l’énergie, du pétrole et des mines, Biramane Souleye Diop, porteur d’un message du Chef d’Etat sénégalais, accompagné de Pape Toby Gaye, a été reçu en audience par Denis Sassou-Nguesso, le mardi 13 mai, à Oyo. Officiellement, le ministre de l’énergie était «porteur d’un message qui rappelle le rôle extrêmement important jouée par Son Excellence Monsieur le Président de la République (du Congo) dans la promotion de la démocratie africaine, le rôle qu’il a joué dans la stabilité, à travers ses interventions bien éclairées sur énormément de sujets qui intéressent l’Afrique. Nous avons abordé des sujets de relation avec le Sénégal et des partenariats qui peuvent s’ouvrir et sur lesquels nous sommes engagés à rigoureusement travailler au bénéfice de nos Nations respectives». Mais, l’échec de la convention d’affermage sera-t-il une épine dans le pied des relations entre le Sénégal et le Congo? Ce qui est sûr, c’est que les Sénégalais ne vont pas commercialiser l’électricité au Congo, même si la convention n’est pas pour l’instant annulée.
Jean-Clotaire DIATOU
Signature de la convention d’affermage
Audience du Ministre sénégalais de l’énergie
