Ne pas participer activement, dès maintenant, à la Zlecaf (Zone de libre-échange continental africain) ne profiterait pas au Congo. Sa croissance économique et financière future en dépend. Pour ce faire, notre pays doit occuper une place envieuse au sein de la Cemac (Communauté économique de l’Afrique centrale). Comme dans les années 1963, 1964, 1965, 1966, 1967, il faut prendre une place de premier rang dans les secteurs tels que: l’agriculture, l’industrie, les transports, les énergies renouvelables, le tourisme, le numérique.
Tous ces secteurs socio-économiques doivent évoluer, pour rendre le marché congolais compétitif. Il importe d’identifier, pour tous ces secteurs, les acteurs pertinents, les gammes de produits et les marchés porteurs.
Quant au tourisme, le Congo peut se fixer comme objectif de performer son tourisme de masse. Cet objectif pourra être atteint notamment par la valorisation des espaces ruraux, du patrimoine rural, de la créativité artistique. Il faut aussi améliorer les sites d’accueil et proposer des prix incitatifs. Avant l’Afrique, l’Asie l’a fait. Mais, cela nécessite une ouverture et des réformes politiques considérables.
Hélas! Le tohu-bohu triste et sanglant des années 1997-1998 n’a pas laissé de grandes traces économiques, sociales et culturelles. C’est en politique que se poursuivent les passions. Le crépuscule du 20ème siècle ne semble pas jeter les airs patriotiques de Jacques Loubélo ou de Franklin Boukaka sur le paysage agité de la République. Or, ceux qui se rappellent encore du dramaturge français, Jean Racine, dans le Cid, savent que ce qui peut nous ravir, nous aussi Congolais, c’est l’héroïsme, l’idéal, la tendresse et la vertu, la grandeur et la grâce.
Par à-coups, la vie politique congolaise se teinte de la querelle des tragiques, de 1959 à nos jours. Nous avons tout le mal ancré dans l’exercice du pouvoir, dans le masque de la République. Alors à bas le tribalisme! La peur, c’est l’aboutissement de ce processus où chacun est coupable, même s’il ne sait pas de quoi. Notre République, si nous la voulons une et indivisible, doit chercher de la force, de la vigueur et de la beauté.
C’est par cette voie que la République accédera avec force et vigueur sur les marches de la Zlecaf. Il est nécessaire que ce grand marché de l’Afrique vienne faire sonner la vaillance des hommes politiques, l’héroïsme de la démocratie, de la République et de l’Etat.
Revenu au pouvoir en octobre 1997, voici le Président Denis Sassou-Nguesso confronté à ce cruel dilemme: comment sortir d’un Etat fragilisé par les malentendus, pour un Etat de la fertilité politique? La démocratie véritable est au centre des miracles du développement qui célèbre les éternels progrès. La tolérance, y compris envers ses adversaires politiques, est la seule réponse satisfaisante. Notre société ne peut plus se passer de communion. Les divisions désignent une société figée, une collectivité inopérante. Les Congolais doivent être représentés dans la Nation comme unie d’une égale tendresse. Car, comme disait André Comte-Sponville, c’est la communion qui fait la communauté, bien davantage que l’inverse. Communier, c’est partager sans diviser. Selon Durkheim, la communion favorise la cohésion sociale, en renforçant la sociabilité et l’adhésion aux règles du groupe.
Or, comment voulez-vous susciter cette adhésion à la Zlecaf, si le Congo devrait y aller avec des vers dans les fruits? Ce ne sera ni commercialisable ni consommable. La Zlecaf doit d’abord être un outil pour la paix. Même si les conservateurs s’en défendent, on retrouve là le choix du compromis. Le chemin est long, mais c’est aussi un problème de stratégie géopolitique. Nous devons faire, au Congo, sur nous-mêmes, un effort de compétitivité, de rigueur et de justice. C’est cela qui conduit à des mobilisations générales, à la constitution des unités de production débouchant sur des économies plus aptes à avoir un impact sur le caractère humain des citoyens, et sur les nécessités économiques d’un Etat idéal.
L’économie et le caractère national sont très liés. La richesse d’une zone économique nourrit le bien être parmi la population et favorise l’unité et la paix dans le pays. Le développement territorial favorise les activités humaines et la façon de vivre. Un Etat qui crée les conditions de sa richesse bénéficie d’une protection non seulement contre une paupérisation de la classe sociale mais également contre des influences indésirables. En partant de l’idée que se fait Montesquieu, le temps est donc venu de porter un projet, d’une autre réalité, adapté à l’Afrique.
Selon Montesquieu, un climat chaud favorise le despotisme et l’esclavage alors qu’un climat froid privilégie la démocratie et la liberté. Il considère aussi que les paysages ouverts qui sont riches grâce à l’agriculture sont sous la menace des envahisseurs… A partir de l’année 1964, le secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique avait demandé à Monsieur René Dumont de préparer une étude générale des problèmes agricoles du continent africain. Cette étude, qui a été publiée aux Editions «Collections Esprit Frontière Ouverte», a débouché sur un titre aux allures hésitantes de «l’Afrique est mal partie». Cette triste réalité qui poursuit l’Afrique.
Chez nous notamment et avant l’indépendance, jusqu’en 1968 inclus, on avait mis l’accent sur le café, le cacao, le riz, le tabac, la pomme de terre, la banane, l’arachide, l’igname, les agrumes, le palmier à huile qui faisaient vivre aux congolais la joie économique. Cette véritable avancée agricole reposait à la fois sur les bases techniques et économiques: bases techniques par le soutien de l’Orstom, l’Office de la recherche scientifique et d’outre-mer. Cet office a donné des signes particuliers et des progrès agricoles indéniables, par quoi la recherche dans le domaine agricole s’est distinguée, pendant ce temps, le Ministère des travaux publics assurait l’entretien des pistes agricoles. Malheureusement, cet outil indispensable au développement économique a été détruit en 1997; bases économiques par les moyens de transport notamment le chemin de fer et le couloir fluvial de Brazzaville à Ndjaména (Fort-Lamy), en passant par Bangui qui constituèrent naguère l’épine dorsale de l’économie congolaise.
La Zlecaf vient nous sauver: nous voyons les insuffisances de la politique, de l’économie et du social. Sur notre pays pèse un lourd héritage historique marxiste-léniniste qui a du mal à rassembler ce qui est pars. Nos instructions bibliques nous enseignent que «lorsqu’on bâtit le Temple de Salomon, on se servit de pierres toutes taillées, et ni marteau, ni hache, ni aucun instrument de fer ne furent entendus dans la maison, pendant qu’on la construisait». C’est à méditer! C’est bien, l’Afrique va, enfin, intégrer son marché commun. C’est un vrai sujet. L’Afrique en a maintenant la volonté, l’engagement, tant mieux!
Ce que l’on peut attendre des dirigeants, ce sont les plus belles créations politiques capables de dissoudre l’intolérance politique, la pensée totalitaire. L’essentiel réside dans le fait que les Congolais doivent exister dans le choix d’une société plus volontaristes sous l’inspiration des bâtisseurs de richesses d’autrefois: dans les années 1960 et même bien avant, les commerçants Bikoumou André, Ntsiétsié, Ebina et Siassia de Gaulle nous ont montré la voie. Ils ont tenu une place centrale dans l’économie nationale naissante. Ils ont trouvé que l’esprit de l’homme congolais ne devait plus errer dans la précarité. C’est dans l’amour de leur pays qu’ils ont fait le bien, qu’ils ont créé des emplois, des choses sans précédent, définissant l’homme en tant que «quêteur» infatigable du bonheur.
Joseph BADILA