Le décret n°2023-1579 du 19 septembre 2023 fixant les modalités de remboursement des arriérés intérieurs commerciaux et sociaux, signé par le Président de la République avec le contreseing de quelques membres du gouvernement a suscité une grande déception dans les milieux des opérateurs économiques congolais. Par cette décision, le gouvernement s’est érigé en juge et partie de contrats commerciaux dans lesquels l’Etat a accumulé des arriérés importants qu’il n’arrive pas à liquider. Pour y parvenir, il s’est taillé une décision dont les opérateurs économiques se sentent plumés. Bref, la justice du plus fort, pensent certains!

La dette intérieure est relevée à la somme totale de 4.309,46 milliards de francs Cfa, en 2022, selon le dernier rapport de la C.c.a (Caisse congolaise d’amortissement). Elle représente 49,59% du P.i.b (Produit intérieur brut) et 52,88% de la dette totale de l’Etat. La dette intérieure commerciale conventionnée (celle due aux banques, aux emprunts obligataires, obligations du trésor…) est de 2.606,95 milliards de francs Cfa. La dette commerciale non-conventionnée (celle due à la plupart de opérateurs économiques congolais et à des entreprises chinoises) s’élève à 1.702,51 milliards de francs Cfa, dont 544,15 milliards de francs Cfa déjà audités, 436,55 milliards de francs Cfa de dette chinoise auditée et 125,08 milliards de francs Cfa en cours d’audit. La dette sociale (arriérés de salaires, pensions, etc) est de 607,23 milliards de francs Cfa.
En septembre 2022, le gouvernement avait déjà mis en place un mécanisme de paiement de la dette commerciale dont les montants étaient compris entre 10 et 50 millions de francs Cfa, avec une décote de 35% que les opérateurs économiques trouvaient trop élevée. «Etant donné que les opérateurs économiques bénéficieront d’une réduction du taux d’imposition des pénalités et des droits principaux, consentis par l’Etat, allant jusqu’à 80% de réduction, au niveau du fisc, la décote de 35% ne peut donc pas poser problème», avait expliqué Wilfrid Albert Ossié, alors directeur de cabinet du ministre des finances.
Cette fois, sans avoir eu à négocier avec les concernés, le gouvernement a unilatéralement reconduit le même mécanisme, en le renforçant. (Voir encadré à droite). Les opérateurs économiques acceptent-ils ces conditions de paiement de leurs créances? Pour l’instant, on n’a pas encore entendu de réaction du côté des syndicats patronaux. Mais, individuellement, les opérateurs économiques sont déçus par cette décision consignée dans un décret présidentiel. Le gouvernement se fait juge et partie dans un contrat commercial. L’Etat a du mal à payer ses dettes. Les questions qu’on peut se poser sont celles de savoir: pourquoi l’Etat congolais s’endette-t-il autant? Pourquoi ne lutte-t-il pas contre la surfacturation des marchés publics? Comme quoi, le règlement de la dette intérieure est un long feuilleton.

Jean-Clotaire DIATOU

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