Les deux mamelles des recettes de l’Etat, à savoir la D.g.i.d (Direction générale des impôts et domaines) et la D.g.d.d.i (Direction générale des douanes et droits indirects), sous tutelle du Ministère de l’économie et des finances, sont sérieusement affectées par les anti-valeurs qui empêchent l’Etat de récolter ses recettes et financer le fonctionnement de ses différents services. Aux impôts comme aux douanes, on parle de «faux et usage de faux, de détournements de fonds publics». Le 4 avril 2024, le ministre de l’économie et des finances, Jean-Baptiste Ondaye, a annoncé que l’enquête sur les opérations frauduleuses à la douane sera étendue à l’administration des impôts et domaines.
Aux impôts, c’est le directeur général, en personne, Ludovic Itoua, qui a été mis en examen par le parquet du Tribunal de grande instance de Brazzaville, «pour faux et usage de faux et détournement de fonds publics» dont le montant n’a pas été révélé. Après avoir payé une caution de 18 millions de francs Cfa, le directeur général a repris le service, en attendant le procès devant la Cour criminelle.
A la douane, 21 douaniers, présumés auteurs de crimes économiques «d’une extrême gravité», ont été présentés le 21 mars dernier, devant le procureur de la République, André Oko Ngakala, qui les a écroués pour «détournement de fonds publics, faux et usage de faux et intrusion frauduleuse dans un système informatique». Le total des montants détournés ferait plus de deux milliards de francs Cfa. Mais, ce n’est là que la partie visible de l’iceberg.
Le phénomène de vol à travers le système informatique ne date pas d’aujourd’hui. En octobre 2018, les deux chefs du service informatique de la Direction générale des douanes et droits indirects à Pointe-Noire avaient été arrêtés et transférés à Brazzaville. Ce phénomène persiste par manque de volonté des gouvernants à sécuriser les déclarations en douane, un secteur où grouillent commissionnaires, passeurs en douane, transitaires, importateurs, etc. Il y a des gens véreux qui cherchent toujours à passer par des méthodes illégales, en payant des droits de douane minimisés à des douaniers complices sans que l’argent n’arrivent dans le compte de la douane à la Banque postale.
Dans une lettre adressée au Premier ministre, en date du 8 avril 2024, depuis Pointe-Noire, et qui a fuité dans les réseaux sociaux, le président de la Coalition des opérateurs économiques du Congo parle de «fraudes dans les opérations douanières au Guichet unique de paiement. Ces fraudes se font dans la gestion et la manipulation du système informatique des douanes par certains opérateurs en contrat avec le cabinet et des agents de la Direction des systèmes informatiques du ministère».
Toujours selon lui, «les déclarations, objet de cette fraude, ont été effacée dans le serveur et que tout se passe dans le système informatique, sous la responsabilité de la Direction des systèmes informatiques du ministère».
Le 1er mars 2024, le ministre Jean-Baptiste Ondaye a mis en place une commission de contrôle des opérations frauduleuses en douane et au Guichet unique de paiement et a informé l’ensemble des opérateurs économiques de s’acquitter des droits et taxes issus du contentieux douanier.
Or, une enquête judiciaire est en cours. Et dans le cadre de cette enquête, 37 commissionnaires agréés en douane, suspendus en janvier dernier par la Direction générale des douanes et droits indirects, ont été interpellés pour certains, présentés au parquet du tribunal de grande instance de Brazzaville et placés en détention préventive à la Maison d’arrêt de Brazzaville. Curieusement, les importateurs, clients de ces commissionnaires, ont été sommés par la commission mise en place par le ministre de l’économie et des finances, de payer les sommes relatives aux déclarations écrasées dans le système informatique de la douane. Pour le président de la Coalition des opérateurs économiques du Congo, la mise en place de cette commission constitue une entrave à la procédure judiciaire en cours. On attend alors, ce que la justice va révéler.
Jean-Clotaire DIATOU