Le Président de la République, Denis Sassou-Nguesso, est invité par son homologue français, le Président Emmanuel Macron, pour une visite officielle à Paris (France), au cours de laquelle les deux Chefs d’Etat aborderont, entre autres, les questions liées à la coopération bilatérale, particulièrement la dette congolaise envers les entreprises françaises évoluant au Congo et le soutien de la France au dossier congolais au F.m.i (Fonds monétaire international). La dernière visite officielle du Président congolais à l’Elysée remonte au 3 septembre 2019 et elle avait révélé qu’il y a des sujets qui fâchent entre Paris et Brazzaville. La nouvelle visite s’effectue dans un contexte toujours préoccupant entre les deux capitales, la guerre ukrainienne en étant un grand point révélateur.
Beaucoup d’observateurs constatent qu’entre Paris et Brazzaville, les relations bilatérales sont en dents de scie. Parfois ça va bien, parfois il y a le froid. Depuis la fin de l’époque Chirac, la tendance est grande dans le ciel des deux pays à l’accumulation de nuages. Même si on est loin des tensions qui peuvent menacer de rupture ces relations historiques, le malaise est parfois invivable.
Dernière illustration et pas des moindres, la réception, mercredi 19 octobre 2022, à Paris, du tout nouveau ministre congolais de l’économie et des finances, Jean-Baptiste Ondaye, par Emmanuel Moulin, le directeur général du Trésor public français, au lieu de son homologue, Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Et si le calendrier de ce dernier ne le lui permettait d’honorer ce rendez-vous ce jour-là, pourquoi pas alors un autre ministre du gouvernement français?
Côté congolais, le non-respect de la réciprocité des formes diplomatiques entre deux Etats souverains est vécu comme un mépris de l’ancienne puissance colonisatrice contre un jeune Etat né de ses ex-colonies en Afrique. Quelles que soient les raisons qu’on peut en donner, cela montre le mécontentement de l’Elysée contre le régime de Brazzaville. Et ce n’est pas pour la première fois que cela arrive.
Il y a des questions qui fâchent entre Paris et Brazzaville. La vieille affaire est celle de la condamnation de Jean-Marie Michel Mokoko dont Paris attend des actes, depuis septembre 2019, allant dans le sens de sa libération. Mais, on peut évoquer aussi la dette congolaise envers les entreprises françaises et la discrète politique pro-russe de Brazzaville dans la guerre d’invasion que la Russie mène en Ukraine.
En matière économique en effet, même si le Congo mène une politique de diversification de ses partenaires, avec la Chine en premier, la France demeure l’un des principaux investisseurs étrangers. Mais, depuis plusieurs années, les échanges commerciaux connaissent une certaine baisse. Participant grandement à l’économie congolaise, beaucoup d’entreprises françaises présentes dans le pays ont des créances que l’Etat congolais n’arrive pas à honorer, suscitant ainsi l’intervention du gouvernement français. La question aurait été évoquée entre Jean-Baptiste Ondaye et son hôte Emmanuel Moulin.
Brazzaville, pour sa part, sollicite le soutien de la France, dans son dossier au F.m.i. Les autorités congolaises redoutent qu’une suppression brutale des subventions des produits pétroliers raffinés, comme le recommande le F.m.i, n’entraîne une explosion sociale que provoquera inévitablement la hausse des prix des denrées de base. Un scénario déjà vu dans d’autres pays africains, avec des conséquences socio-politiques imprévisibles.
Côté diplomatique, les rumeurs de l’éventuelle installation d’une base de la milice russe Wagner à Pointe-Noire ont suscité des inquiétudes dans les capitales occidentales, particulièrement à Paris. Brazzaville a pris la question au sérieux, en faisant un démenti cinglant. Mais, en raison de sa proximité idéologique avec Moscou, les soupçons ne semblent pas être totalement balayés. Denis Sassou-Nguesso ne manquera sans doute pas de rassurer son homologue français sur cette question. Comme quoi, entre Brazzaville et Paris, ça va bien, mais il y a trop de questions qui fâchent!
Jean-Clotaire DIATOU