Le Conseil des ministres, qui s’est réuni lundi 7 octobre 2024, au Palais du peuple, à Brazzaville, sous le haut patronage du Président de la République Denis Sassou-Nguesso, a adopté, entre autres, le projet de loi des finances 2025, présenté par le ministre du budget, du portefeuille public et des comptes publics, Ludovic Ngatsé. Ce projet de loi de finances prévoit des recettes de 2.826 milliards de francs Cfa, en augmentation par rapport à 2024 où les recettes sont prévues à 2.625,081 milliards de francs Cfa. Avec un tel budget, que sera, pour les Congolais, l’année 2025, quand on voit ce qu’est 2024, une année très critique au plan financier?
Les textes de budget de l’Etat sont comme des pots de fleurs devant une maison. Ils sont là pour embellir. Ce qui ne veut pas dire que tout ce qui sort de cette maison est toujours beau. Malgré son budget, l’année 2024 est affectée par une crise financière qui impacte terriblement la vie socio-économique dans le pays. Pourtant, à voir le budget, le pays n’allait pas autant souffrir de la disette financière. 2025 semble emprunter le même schéma. C’est l’année où le budget de l’Etat bascule du «budget dit de moyens au budget-programme, avec la prise en compte, après une phase expérimentale en 2024, de l’ensemble des ministères à partir de 2025». Mais, c’est aussi une année qui, au regard du projet de budget adopté par le Conseil des ministres, semble prometteuse sur le plan financier.
«Le projet de budget 2025 prévoit des recettes budgétaires de 2.826 milliards 616 millions de francs Cfa et des dépenses de 2.233 milliards 224 millions de francs Cfa, dégageant un solde budgétaire global (positif) de 593 milliards 392 millions de francs Cfa», signale le compte-rendu du Conseil des ministres. Et dans les détails, qu’est-ce que c’est rassurant: «De façon globale, les recettes budgétaires sont en légère progression de 8,48%, portées par les recettes des impôts et taxes (1.001 milliards 89 millions de francs Cfa) qui augmenteront de 30,62% par rapport au budget 2024 et celles des douanes (220 milliards de francs Cfa de francs Cfa) qui progressent de 15,32%.
Les dépenses d’investissement sont fixées à 516 milliards de frs Cfa toutes sources confondues, contre 461 milliards de frs Cfa en 2024, ce qui représente une augmentation de 55 milliards de frs Cfa, soit +12%.
Les ressources internes, en matière d’investissement, sont estimées à 278 milliards de frs Cfa dans le budget 2025; elles sont déclinées comme suit: 20 milliards de frs Cfa pour les projets de maintenance; 55 milliards de frs Cfa pour les études de faisabilité, à travers une dotation du fonds d’étude; 88 milliards 339 millions de frs Cfa pour les projets du P.n.d 2022-2026; enfin, 46 milliards 612 millions de frs Cfa pour les projets d’investissement classique».
Pour ce qui est des recettes pétrolières, les hypothèses retenues indiquent une «production pétrolière nationale estimée à 100 millions de barils contre 107,775 millions dans le budget 2024, un prix du brut congolais établi à 74 dollars Us, contre 75 dollars Us dans le budget 2024 et un taux de change du dollar à 615,5 F Cfa».
Cet optimisme politique est exprimé aussi par les projections du P.i.b (Produit intérieur brut). «Sur le plan national, la croissance économique devrait connaître une légère accélération de 0,5%. Elle ressortirait ainsi à 3,8% en 2025 contre 3,3% en 2024, grâce au dynamisme du secteur hors-pétrole, avec une contribution de 4,1%, et le raffermissement du secteur pétrolier, dont le taux de croissance s’établirait à 3,1% contre 1,7% en 2024». Il faut seulement se poser la question de savoir, comment un pays en déficit de production énergétique fait-il pour que son économie (hors pétrole) produise plus, pour avoir une croissance positive?
En réalité, il ne faut pas se laisser prendre par ces estimations trop optimistes. Le chapitre que les membres du gouvernement n’ont pas regardé dans les détails des chiffres et qui fait mal au budget de l’Etat, c’est celui de la dette publique. Le gouvernement prévoit simplement de «gérer la dette publique, afin de la maintenir à un niveau de soutenabilité, grâce à la poursuite de sa restructuration, tout en allégeant ses maturités, pour réduire son fardeau à court terme». Aucun chiffre n’est avancé. Or, la dette publique plombe l’économie nationale. Le fait que l’Etat ne paye pas les entreprises est un facteur économique négatif. Quel est le niveau de cette dette au sortir de 2024? A combien le gouvernement prévoit de la rembourser en 2025? Quelle est la part de la dette publique «restructurable» et celle qui ne l’est pas?
A vrai dire, la chance de l’économie congolaise ne viendra, une fois de plus, que du secteur pétrolier (gaz naturel liquéfié compris). En effet, avec les guerres qui s’aggravent dans le monde (Ukraine/Russie; Israël/Iran et tutti quanti; instabilité du Venezuela, insécurité sur la Mer Rouge et le Golfe d’Aden à cause des rebelles houthis, etc), les prix du pétrole vont connaître une grande envolée en 2025 et l’Etat engrangera des recettes très importantes. Encore faudrait-il bien gérer, en évitant les avatars du passé. Si le parlement pouvait avoir des débats libres et démocratiques, il aiderait le pays à bien cerner ses maux, pour en trouver les thérapeutiques nécessaires, afin de doter le pays de budgets réalistes, prenant en compte, avec un esprit de responsabilité, la dimension de la dette, particulièrement la dette publique intérieure qui détruit l’économie et condamnent les jeunes au chômage.
Jean-Claude DIATOU