Mieux vaut tard que jamais. La Cour suprême a lancé, pour la première fois, lundi 15 janvier 2024, au Palais des congrès de Brazzaville, la tradition de la rentrée judiciaire, à travers une audience solennelle, présidée par son premier président, Henri Bouka, en présence du Président de la République, Président du Conseil supérieur de la magistrature, qui y est intervenu, à travers un message. A cette occasion, Henri Bouka a présenté le rapport des activités réalisées par les différentes catégories de juridictions sous tutelle durant l’année écoulée. Mais, la solennité de cette audience a été marquée par la lutte contre les anti-valeurs au sein de la magistrature, pour une justice équitable. Dans l’assistance, il y avait les autorités nationales, notamment les président des deux chambres du parlement, Pierre Ngolo (sénat) et Isidore Mvouba (Assemblée nationale), le Premier ministre chef du gouvernement, Anatole Collinet Makosso, le président de la Cour constitutionnelle, Auguste Iloki, les présidents des institutions constitutionnelles et des leaders religieux.
Ouvrant l’audience solennelle de la Cour suprême, la première du genre après 62 ans d’existence, Henri Bouka a rendu hommage à ses prédécesseurs déjà dans l’au-delà, notamment Charles Assemekang et Placide Lenga. Dans son rapport d’activités, il ressort, entre autres que, durant les deux dernières années, le système judiciaire a rendu, au total, 1.154 arrêts et traités sur 1.830 affaires soumises; 9.141 affaires ont été jugées dans les Tribunaux de grande instance et 1.156 affaires dans les tribunaux de travail. Concernant la déclaration de patrimoine, la Cour suprême a reçu 73 déclarations de patrimoine. De ce rapport, on retient aussi l’organisation par la Cour suprême, des sessions de formation destinées aux magistrats. Le premier président de la Cour suprême a, ensuite, longuement insisté sur le travail et l’éthique et la déontologie des magistrats.
Dans son message, le Président Denis Sassou-Nguesso a demandé à l’ensemble de la sphère judiciaire nationale, à s’impliquer davantage dans l’organisation du travail, afin de contribuer à la modernisation du système judiciaire. «Pour cette année judiciaire, je souhaite que s’intensifie l’effort de modernisation de notre système judiciaire, par entre autres, une meilleure organisation du travail au sein des cours et tribunaux. J’ose croire que les faiblesses déplorées au niveau de l’effort au travail comme plan strictement éthique et moral, ne seront plus que de simples et lointains mauvais souvenirs à jamais révolus. La justice doit prendre sa juste place dans la grande œuvre nationale de construction de l’Etat de droit», a-t-il déclaré.
Il a également appelé la Cour suprême à avoir une doctrine claire résultant de l’application et de l’interprétation conforme des lois. De ce fait, elle doit publier ses arrêts, afin que les juridictions d’instance et d’appel les connaissent, s’en imprègnent et s’en servent pour donner une image harmonisée et régulée de la justice congolaise.
Le Président de la République a aussi demandé aux magistrats de la Cour suprême de «combattre la lenteur qui érode l’image de la justice et ronge sa notoriété. Et qui, si l’on n’y prend pas garde, peut ruiner sa crédibilité devant l’opinion». Il s’en est pris aussi à certains huissiers de justice qui excellent dans les antivaleurs et la médiocrité et qui vont jusqu’à saisir les comptes en banque des parties perdantes. Pour le Chef de l’Etatn «ce genre de comportements qui n’honorent guère le système judiciaire a conduit, dans d’autres cieux, à la ruine de l’économie nationale (…) Tout comme le magistrat, l’huissier de justice doit-être un homme d’honneur, respectueux des lois et règles de son métier». Ainsi, il a invité la Cour suprême à ratisser plus large quant à l’amélioration du climat des affaires. «Ici, je construis le socle de confiance et de mobilisation des investissements étrangers en faveur du Congo. C’est la responsabilité du pouvoir judiciaire qui n’a que trop porté préjudice à l’image et à la crédibilité de notre pays, vis-à-vis des partenaires au développement», a fustigé Denis Saou-Nguessou. Et d’ajouter «le désintéressement, l’impartialité et l’équité sont et doivent demeurer de tout temps et en toute circonstance le crédo du juge».
«Je déclare avoir pris bonne note de vos orientations». C’est par ces propos qu’Henri Bouka a clos la première audience solennelle marquant la rentrée judiciaire de la plus haute juridiction du Congo. Rendez-vous a été pris le 15 janvier 2025, pour la prochaine audience solennelle.
Hervé EKIRONO