Il ne serait pas exagéré de dire que ce que le Congo est en train de vivre, sur le plan socio-économique, résulte aussi de la présence du ver dans le fruit. Nous le savons tous que, lorsque le ver est dans le fruit, il le ronge de l’intérieur alors que de l’extérieur, le fruit présente toujours son bel aspect; on ne se rend compte de rien des dégâts que le ver est en train de causer à l’intérieur du fruit. Et puis, le jour où vous avez envie de déguster votre fruit, vous le coupez et tout de suite, vous voyez les dégâts causés par le ver; le fruit n’est plus comestible.
Sans s’attaquer à la racine du mal, vains seront les efforts de mise en œuvre des projets, programmes et plans de développement national. Le mal est connu de tous et il y a bien des années qu’on l’indexe ou le tutoie sans jamais oser le terrasser véritablement. Le mal, c’est la corruption. C’est un mot qui ne semble plus dire grand-chose dans le langage politique national où il a fait de terribles mutations culturelles. Surfacturation des marchés publics, concussion, abus de biens sociaux dans les administrations et les entreprises publiques, etc, sont des pratiques qui ne choqueraient plus que les hypocrites, dit-on, car elles sont les mieux partagées dans les milieux des cadres dirigeants.
A cause donc de ce mal, l’Etat voit ses efforts d’investissement souvent réduits à néant. Du Fonds de soutien à l’agriculture au Fonds d’impulsion des petites et moyennes entreprises (Figa), les ratés sont les mêmes. Si ces investissements avaient prospéré, on n’aurait sans doute plus les mêmes complaintes ou récriminations dans l’agriculture et l’appui aux jeunes entreprises. Ecair et la S.t.p.u (Société de transport public urbain) ont englouti des milliards de fonds publics. Comment ne pas se prendre de pitié pour les dettes sociales laissées et les jeunes compatriotes qui ont retrouvé le chômage, après avoir pourtant trouvé un emploi? Les faîtières des systèmes nationaux de santé et d’enseignement sont plongées dans des grèves générales illimitées. Les populations, les étudiants sont dans le désespoir. Avec ça, qui peut croire que notre gouvernance publique est performante? Certaines décisions gouvernementales donnent l’impression de faire du sur place; on n’avance pas. Le peuple regarde puisqu’il n’a pas de choix. Un jeune cadre a découvert un réseau de détournement de fonds publics dans un hôpital. Comme il ne sait pas se taire, on l’a remis dans la rue. Personne pour l’écouter et tirer la substance de ce qu’il dénonce, afin de voir comment l’Etat peut remettre de l’ordre à ce niveau. Bref, quand un ver est dans un fruit, il le ronge de l’intérieur. Depuis le sommet, on a déjà tiré la sonnette d’alarme, mais que faut-il faire pour terrasser véritablement le ver à l’intérieur du fruit ?
L’HORIZON AFRICAIN
