Dans l’aire culturelle kongo, il existe une croyance ancestrale que le mort peut désigner lui-même celui qui est à l’origine de sa mort. Il suffit pour cela qu’un «nganga-ngombo» (devin) parle au mort, quand le corps est placé dans le cercueil, lors de cérémonie funéraire au village. Porté par quatre personnes ou plus, dans une ambiance délirante de transe alors que la foule, par les chants et les cris, le presse à désigner l’auteur de sa mort, le cercueil passe de case en case, suivant un rituel connu, jusqu’à aller frapper plusieurs fois à la porte ou sur le mur de la case ou la maison du présumé sorcier à l’origine de sa mort.
Le devin le fait aussi à l’aide d’un tipoye contenant des éléments accusatoires ou fétiches de nature à indiquer le présumé sorcier. Désigné ainsi, le ndoki est attrapé et subit le sort réservé au sorcier: la mort par lapidation, s’il n’a pas réussi à s’enfuir, alors que sa case ou sa maison est détruite. Bannie depuis l’évangélisation, cette pratique cultuelle, qu’on peut appeler la «danse du cadavre» ou la «marche du mort» revient de temps à autre, particulièrement dans les cas de mort subite ou considéré comme n’étant pas naturel. La famille ayant perdu un être cher réclame parfois de faire faire le tipoye sorcellaire (Tipoyi tu sa) ou d’aller au ngombo, pour connaître l’auteur de la mort, afin de lui régler les comptes.
Ces derniers temps, des ex-combattants ninjas s’étant érigés en «nganga-ngombo» en ont fait un fonds de commerce dans certaines zones du Pool, avec des conséquences destructrices de la vie familiale et sociale, comme à Yangui, une localité située entre Kinkala et Mindouli. Des associations et des communautés religieuses ont fait le lobbying auprès des autorités locales et le préfet a fini par prendre la décision d’interdire cette pratique néfaste à la société. Mais, encore faut-il que sa décision soit respectée par les ex-combattants. C’est l’un des sujets abordés lors d’une rencontre, le 8 octobre 2025, à la préfecture, entre une délégation du pasteur Ntumi, conduite par Philippe Ané, les officiers responsables de la force publique locale et le préfet Jules Monkala Tchoumou. A cette séance de travail, la délégation du pasteur Ntumi, qui a demandé l’accélération de la réinsertion des ex-combattants, s’est engagée à faire respecter la décision du préfet sur l’interdiction de la pratique du tipoye destiné à désigner des sorciers.
Jean-Clotaire DIATOU








