La maîtrise de l’énergie est l’une des clés du développement économique. C’est ce qui fait dire à Rifkin que «les régimes énergétiques déterminent la nature des civilisations». Celles qui ont apprivoisé l’énergie se sont ouvert la come d’abondance. En effet, la diversification économique s’est confortablement installée dans les sociétés qui ont mis fin au pouvoir des animaux sur la production en tant que source d’énergie.

L’énergie est passée du pouvoir des animaux à celui de la matière, avec l’eau, le charbon et le pétrole. Par la suite, à l’infiniment grand de ces matières, comme source d’énergie, les économies développées ont associé l’infiniment petit, avec l’atome. On ne devrait jamais perdre de vue, dans une certaine mesure, ce mot d’ordre de Lénine au 8ème congrès des Soviets, en 1920, «le communisme, c’est le gouvernement des soviets plus l’électrification de tout le pays, car sans électrification, il est impossible de perfectionner l’industrie». Ce mot d’ordre est à l’origine de la conception du Plan Goelro, à la suite des travaux de plusieurs ingénieurs et savants, pour l’électrification de tout le territoire de l’Union soviétique. Le but était «…l’organisation de l’industrie sur la base d’une technologie de pointe, l’électrification qui créera un lien entre ville et campagne, mettra un terme à la division entre ville et campagne, rendra possible l’élévation du niveau d’instruction de la province et la défaite de l’ignorance, de la pauvreté, de la maladie et de la barbarie même dans les régions les plus reculées». Il est ainsi établi que la conséquence de la maîtrise de l’énergie a été la diversification de l’économie, en mettant à la disposition du marché des nouveaux biens, produits de l’innovation technologique et de la recherche. Avec la maîtrise de l’énergie, le marqueur primordial a été le développement de la capacité mécanicienne, avec la recherche et les inventions. Il prend corps en 1769, avec le moteur à vapeur inventé par James Watt. En 1807, François Isaac de Rivaz dépose un brevet sur le moteur à explosion. L’industrie textile connaît un nouvel essor avec l’utilisation du coton et du métier à tisser, ainsi que de la navette volante. La mise au point des nouveaux engrais et l’invention de la moissonneuse batteuse révolutionnent l’agriculture. Les techniques de transformation des produits alimentaires et autres offrent des biens durables avec les boîtes de conserve, les plats à emporter, les plastiques, les textiles synthétiques et les produits pharmaceutiques. Des nouvelles inventions allègent la vie de tous les jours. C’est le cas notamment avec l’électricité domestique, le fer à repasser, la cuisinière, la machine à laver, etc. L’étude de l’atome a permis la mise au point des technologies modernes telles que le transistor et l’imagerie médicale, entre autres. La digitalisation du monde est certainement l’innovation majeure de la quatrième révolution industrielle. Les innovations en matière d’organisation du travail et de la production ont largement contribué à la diversification de l’économie. Ainsi, depuis la première révolution industrielle, l’énergie, «l’innovation technologique, la modernisation industrielle et la diversification permanentes de l’économie sont les assises fondamentales du développement économique moderne». Il convient d’insister sur le rôle de l’innovation, ou d’une manière générale, sur la maîtrise des connaissances scientifiques et technologiques au service de l’économie. Dans toute l’histoire de la révolution industrielle, l’innovation, par une offre diversifiée des biens, a créé la demande qui, par le biais des nouveaux besoins, a généré une offre supplémentaire. Le même phénomène a été observé par Oscar Libotte, qui rapporte que dans le Royaume du Kongo, la maîtrise des techniques dans la fonte du fer et du cuivre, dans le travail de l’or et de la poterie, dans le tissage a produit un système économique opératoire, avec un échange marchand avec un large réseau commercial. Oscar Libotte rapporte que «les techniques [y] étaient plutôt poussées: on y connaissait la fonte du fer et du cuivre, l’art de la poterie, le tissage d’étoffes si résistantes qu’elles furent employées par les Portugais comme voiles de bateaux. On peut également indiquer comment la maîtrise des techniques de l’irrigation a considérablement modifié le progrès agricole et même a restructuré des configurations sociétales». Ainsi, par exemple, lorsque l’on considère la question de l’eau, notamment les techniques d’irrigation dans le Moyen-Orient, Damien Calais et Élisabeth Mortier affirment que «la persévérance dans la recherche de solutions techniques est la conséquence d’un refus de revenir sur un changement social apporté par les techniques modernes de captage de l’eau souterraine, en particulier les pompes motorisées: l’eau est passée du statut de bien commun à celui de bien ouvert, en libre accès. Son usage individualisé et en apparence illimité est perçu dans les sociétés comme une preuve du progrès dont elles jouissent». Ainsi, comme le constate Bindé Jérôme dans l’introduction générale d’une publication de l’Unesco, «l’innovation est reconnue comme le moteur même du développement; les forces du marché placent au premier plan les séductions de l’offre, la multiplication infinie des désirs, que seul un dynamisme incessant de créations attirantes peut entretenir». Mieux, l’innovation est le fondement d’une nouvelle civilisation, celle produite par la maîtrise des connaissances. C’est donc à juste titre que Sagasti Francesco affirme que «nous risquons de voir apparaître deux civilisations, aux regards et aux rôles radicalement différents: l’une produira et exploitera des connaissances; l’autre recevra ces connaissances de façon passive, n’ayant pas les outils nécessaires pour s’en servir». La gestion subie de la covid-19 par l’Afrique illustre bien ce propos. Un autre apport de l’innovation ou de la recherche d’une manière générale et qui est également un facteur de diversification, est le relèvement de la qualité des produits. Dans une étude publiée en 2010, Khandelwal Amit affirme que «la capacité des pays en voie de développement d’opérer une transition des produits de moindre qualité vers ceux de meilleure qualité est donc considérée par certains comme la condition nécessaire (mais certainement pas suffisante) pour l’essor des exportations et, enfin de compte, pour le développement». On peut illustrer cette assertion avec la fabrication du pain de manioc au Congo. Produit de grande consommation, qui pourrait même être exporté, le pain de manioc est présenté sur le marché national tel qu’il l’a toujours était, sous sa forme et conditionnement primitifs. Or, le relèvement opéré au Canada et aux Etats-Unis sur ce produit, en matière de fabrication et de conditionnement, le positionne comme produit industriel. De même, l’expérience au Gabon sur l’utilisation de la farine du manioc dans la fabrication du pain assure une transition vers un produit de qualité, comme il en est de même par sa transformation en vin au Burkina Faso. On peut également citer l’exemple du Rwanda qui fabrique de la vodka à partir du manioc.Cependant, le potentiel d’amélioration de la qualité, c’est-à-dire la taille de l’échelle de qualité d’un produit varie selon les produits (Khandelwal, 2010; Schott, 2004). «Les ressources naturelles ont tendance à avoir moins de potentiel de relèvement de la qualité que les produits agricoles ou manufacturés, ces derniers étant en général ceux qui recèlent le plus fort potentiel. Pour les pays qui en sont aux premiers stades de développement, la diversification vers des produits dont l’échelle de qualité est plus longue peut s’avérer être une première étape nécessaire, avant de pouvoir recueillir les abondants fruits d’une meilleure qualité. Par ailleurs, du fait de la petite taille de leur économie et de leurs faibles possibilités d’exploiter des économies d’échelle, il peut s’avérer coûteux pour les pays à faible revenu de se lancer dans un grand nombre de nouveaux produits, et plus faisable d’entamer le processus de diversification, en passant d’abord par une amélioration de la qualité des produits existants». La combinaison «maîtrise de l’énergie-recherche» a permis à l’humanité de faire un bond fulgurant dans la gestion de la vie quotidienne et des activités domestiques. Cela va du téléphone mobile aux ordinateurs portables, en passant par des consoles de jeux, des appareils photo numériques, de la monétique, de la sécurité et des objets connectés. Autant de produits qui diversifient les économies qui ont eu l’intelligence de générer des nouvelles synergies entre la domestication de l’énergie et la promotion de la recherche scientifique et technologique.

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