Dans un pays comme le Congo-Brazzaville, doté de ressources naturelles immenses, avec un potentiel économique à faire pâlir d’envie nombre d’investisseurs, sa population d’à peine 6.142.180 habitants (R.g.p.h 5) jouirait d’un minimum de conditions de vie adéquates. Or, 64 ans après son indépendance, même l’eau courante en vient à être un problème non encore entièrement résolu dans sa capitale, Brazzaville. On ne fait qu’accuser les crises économiques et politiques, pour justifier notre incurie à prendre soin de nos populations.
En réalité, la vraie crise dont souffre notre pays est l’affaiblissement du niveau moral de son élite intellectuelle et politique, l’érosion de l’éthique au profit de l’enrichissement personnel couvert par l’impunité politique qui entraîne l’impunité judiciaire. Il est reconnu que la crise morale est «un symptôme de la crise politique et économique d’une société». Les comportements de prédation au sein d’une classe politique émergent avec l’érosion de l’éthique en politique. Si hier, pendant le parti unique, pour un cadre exerçant les responsabilités publiques, afficher une fortune au-delà de ses revenus légaux constituait un motif d’interpellation au sein du parti, pouvant conduire jusqu’à la condamnation en justice, aujourd’hui, cela ne gêne plus personne.
Au contraire, l’ouverture à la démocratie, avec son principe d’alternance au pouvoir, a fait émerger une culture du profit personnel, car demain vous ne serez plus là et personne, même pas l’Etat, ne s’occupera de vous. Un acteur politique n’avait-il pas dit: «C’est notre tour»? Ce qui signifie, grossièrement: «Laissez-nous nous servir, attendez votre tour». Ainsi, les milliardaires ne sont plus les opérateurs économiques, plutôt des politiques qui ont la chance d’occuper les postes les plus juteux de l’Etat. Chacun en profite suivant sa position, à qui mieux mieux! Affichez une fortune au-delà de ses revenus légaux n’est plus un problème. Au contraire, cela confère, désormais, un statut social respectable. C’est la démocratie! Mais en réalité une dérive morale qui entraîne le pays à la ruine, malgré ses richesses naturelles.
Il n’est donc pas étonnant que, quand les travailleurs d’un hôpital lancent un avis de grève, le gouvernement ne s’en préoccupe même pas; cela n’empêche pas les dirigeants politiques de dormir de leur saint sommeil. Les caisses de l’Etat sont là pour leur garantir les soins médicaux à l’étranger, pour un moindre bobo. Où est le problème?
Ainsi, tant qu’il y a la crise morale, il n’y a pas de chance à un programme de réformes de redresser l’économie nationale. On ne le dira jamais assez, si des actions concrètes avaient suivi le discours d’investiture de 2009 du Président Denis Sassou Nguesso, quand il appelait les cadres à changer de comportement, le Congo serait aujourd’hui, à l’abri des crises socio-économiques qu’il continue de connaître, faisant ainsi souffrir sa population.
Comme on s’est retenu de lutter concrètement contre la corruption, pour ne s’arrêter qu’aux discours, la jarre est demeurée percée partout, impossible de la remplir. C’est le problème que traîne le régime actuel, qui continue de recourir à l’endettement, pour faire fonctionner l’Etat, en fermant les yeux sur les comportements prédateurs de son élite à la tête des affaires publiques. Et ce n’est pas l’arrestation des petits poissons qui va mettre un terme à l’hémorragie des finances publiques. Ne dit-on pas que: «Qui aime bien, châtie bien»? Il n’y a pas de réussite sans rigueur. C’est en transigeant avec la rigueur et l’éthique qu’on se retrouve dans le marasme.
L’HORIZON AFRCAIN