Le temps a placé Tchicaya U Tam’Si et Maxime Ndébéka comme symboles de la poésie, de la résistance et de la souffrance des Congolais pendant les périodes les plus sombres de la colonisation et du régime marxiste. Des vies très différentes bien que cette condition soit commune aux deux. Un régime dictatorial et totalitaire est généralement oppressif. Lui porter la contradiction serait une forme de mise en péril de sa quiétude et même de sa vie. Ainsi, Tchicaya U Tam’Si et Maxime Ndébéka sont des symboles de l’audace.
Né le 25 août 1931 à Mpili, dans l’actuel Département du Kouilou, en République du Congo, et mort le 22 avril 1988, à Bazancourt, dans le Département de l’Oise, en France, Gérald-Félix Tchicaya alias Tchicaya U Tam’Si, «la petite feuille qui chante son pays», est considéré comme le poète africain le plus doué de sa generation et l’un des plus grands auteurs littéraires du continent africain, au 20ème siècle. Il publie son premier recueil de poésie, «Le mauvais sang», à 24 ans. Il a l’audace, bien avant son contemporain, le Nobel nigérian Wole Soyinka (1986), de «faire voler en éclat les certitudes de la négritude: oublie d’être nègre pour pardonner cela au monde… Qu’on me laisse la paix d’être Congolais».
Une affirmation qui lui coûte très cher, à l’époque, pour les reconnaissances futures, mais lui permet de s’affranchir de l’ombre tutélaire de son père, Jean Félix Tchicaya, élu député du Moyen-Congo en 1945, à l’Assemblée constituante, à Paris.
En 1960, Tchicaya U Tam’Si rencontre Patrice Lumumba, l’une des principales figures de l’indépendance du Congo belge et Premier minister. Le coup de foudre est réciproque. L’écrivain entre dans la défense de son combat politique, mais avec son arme de prédilection, l’écriture. Mais, le 17 janvier 1961, Patrice Lumumba est assassiné. Le lendemain, c’est au tour du père du poète de décéder à Pointe-Noire. Profondément meurtri, Tchicaya U Tam’Si prend le chemin de «l’exil» et s’installe en France, où il preste à l’Unesco, une aubaine pour écrire et gagner sa survie, jusqu’en 1986 quand il prend sa retraite, pour se consacrer à sa vraie passion, l’écriture, jusqu’à ce que la mort dise son dernier, en 1988.
Maxime Ndébéka
Il vient au monde un 10 mars 1944, à Brazzaville. Maxime Ndébéka, (80 ans aujourd’hui), est une des grandes figures de la littérature africaine, ayant traîné sa plume dans la poésie, le conte, le roman et le théâtre où il s’érigea en grand metteur en scène. Toutes ses pièces ont été jouées, enregistrées, diffusées en France, en Afrique ou en Allemagne. En tant que directeur de la culture et des arts, de 1968 à 1972, il a marqué l’histoire de la culture dans son pays, en co-organisant le premier Festival des arts au Congo et en faisant créer, en 1969, le Cfrad (Centre de formation et de recherche d’art dramatique) à Brazzaville.
Militant marxiste ayant étudié dans l’ex-Union Soviétique et flirté avec la Chine populaire, il s’est intéressé aux arts, dès son plus jeune-âge. Maxime Ndébéka s’est engagé, par la suite, pour la liberté et la justice. Au départ, sa poésie exprimait le désenchantement.
Maxime Ndébéka, c’est le poète du «980.000», «Nous oserons», dans sa pièce de théâtre, «Le Président», publiée en 1970 aux Editions P.J Oswald, en France. Mais, dans le contexte politique de l’époque, certains textes lui ont valu d’être condamné à mort, puis assigné à résidence, jusqu’en 1975. Exilé en France, il regagne, en 1993, son pays, le Congo, qui a tourné le dos au parti unique, pour embrasser la démocratie pluraliste. Sur proposition d’un collectif d’artistes, il est nommé, par le Président Pascal Lissouba, comme ministre de la culture et des arts, en 1996. Mais, en juin 1997, la guerre civile éclate et il prend de nouveau le chemin de l’exil. Grâce à son ami, Jacques Lang, il regagne la France, en 1999.
Roland KOULOUNGOU