La récente publication, en février 2025, des indices de perception de la corruption par Transparency international, place le Congo, pour la première fois de son histoire, au 151ème rang dans le rapport de Transparency international. Notre pays vient ainsi de faire un bond de 14 places, par rapport à 2019, année marquante de la manifestation de la volonté politique des autorités congolaises, traduite par les réformes engagées par le gouvernement dans le secteur de la gouvernance anticorruption. La création de la H.a.l.c (Haute autorité de lutte contre la corruption), par loi n° 3-2019 du 7 février 2019, en est l’illustration la plus éloquente.
Comme toujours, l’Afrique subsaharienne, du fait de ses faiblesses surannées, telles que les conflits et crises sanitaires, demeure dans les profondeurs du classement de Transparency international. 50% des pays aux scores les plus bas, les «bottom scorers», sont en Afrique, à l’instar du Soudan du Sud, de la Somalie, de l’Erythrée, de la Lybie et de la Guinée Equatoriale dont les scores I.p.c vont respectivement de 8 à 13.
Le rapport annuel sur l’I.p.c 2024 (Indice de perception de la corruption) de Transparency international révèle, à n’en point douter, comme le souligne François Valérian, président de cet organisme indépendant de lutte contre la corruption, que celle-ci ne cesse d’être, pour les Nations, une menace qui sape non seulement les fondements de développement des Nations, mais aussi provoque le déclin de la démocratie, l’instabilité et les violations des droits humains. Le fléau gangrène et bon nombre de pays obtiennent des niveaux de corruption alarmants. Plus de deux tiers des 180 pays, selon le rapport de Transparency international, obtiennent une note inférieure à 50%, la note 100 étant taxée d’absence de corruption dans un pays et 0 étant la note qui traduit une forte corruption.
En 2019, avec un score d’indice de perception de la corruption à 19, la place occupée par le Congo se situait au 165ème rang. Il est resté d’ailleurs à ce niveau, pendant trois ans, de 2018 jusqu’à 2020, année d’’installation de la H.a.l.c dans ses charges, sous l’autorité de son président, Monsieur Emmanuel Ollita Ondongo, expert en criminalité financière et gouvernance anti-corruption, qui a longtemps fait ses classes dans lesdits domaines.
Ainsi, par les réformes engagées, le Congo, qui a adhéré aux conventions des Nations unies contre la corruption et de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption, ratifiées respectivement par les lois n°13 et 14-2005 du 14 septembre 2005, a développé un cadre juridico-institutionnel érigeant un écosystème de lutte contre la corruption très apte pour mener à bien le combat contre le phénomène de la corruption.
Au texte sur la création de la H.a.l.c se sont ajoutés d’autres textes, tels que la loi n°4-2019 du 7 février 2019 relative à l’obligation de déclaration de patrimoine par les citoyens élus ou nommés à une haute fonction publique ou encore la loi n°9-2022 du 11 mars 2022 portant prévention et lutte contre la corruption et les infractions assimilées.
Menant à bien sa mission, la H.a.l.c, qui est à sa cinquième année d’existence, a réalisé des campagnes de sensibilisation et vulgarisation des textes ainsi que des échanges interactifs s’adressant, dans tous les départements du pays, à l’ensemble des autorités locales et cadres administratifs, la société civile et la population active. Des enquêtes et investigations dans les administrations publiques et privées ainsi que dans divers secteurs de l’économie nationale ont été également diligentées.
Les hauts-cadres du gouvernement, des institutions constitutionnelles et des différentes administrations de la République se sont mobilisés, à l’instigation de la H.a.l.c, pour déclarer leur patrimoine devant la Cour suprême. Ces mêmes cadres précités, en s’associant aux parlementaires et aux officiers supérieurs de la Force publique, se sont prêtés à la déclaration d’intérêts à la H.a.l.c au cours de l’année 2024. Tout ce qui précède a certainement concouru à l’évolution de l’indice de perception du Congo qui s’est déplacé des basfonds où il était installé de longue date, vers des meilleures hauteurs. Et cela d’année en année depuis 2019.
Peut-on encore douter que c’est par le travail acharné sans doute de l’ensemble de l’écosystème de lutte contre la corruption et singulièrement de la Haute autorité de lutte contre la corruption, depuis son installation, que cela a été rendu possible?
Pour mieux apprécier les efforts accomplis par le Congo, il faut d’abord admettre, selon ce dernier rapport de Transparency international, que le Congo fait partie des 32 Etats qui améliorent leur niveau de corruption sur la période allant de 2012 à nos jours. Il y a ainsi 148 pays qui stagnent ou qui ont aggravé leur niveau de corruption au cours de la même période.
Certes, le Congo demeure dans la majorité des pays (plus des deux tiers) dont la moyenne mondiale du point de vue du score est de 43, soit en dessous de 50. Au plan africain, il se place dans les 90% des pays dont la moyenne du score de l’indice est à 33/100.
Cependant, dans l’espace sous-régional et en concentrant le regard sur les pays limitrophes, le Congo est, avec l’Angola, dans une moindre mesure, le pays qui enregistre une tendance haussière soutenue, tant du point de vue des scores que du rang obtenu au cours de cette période. Ce dernier pays gagne, en effet, par rapport à 2019, 6 points contre 4 pour le Congo. Tous les autres pays enregistrent soit des gains des scores plus bas, de 1 à 2, voire négatifs, de moins 1 à, moins 4. Par rapport à 2023, seuls le Congo et le Tchad enregistrent une évolution positive de score. Du point de vue du rang, le Congo trône seul en tête pour ses 7 points gagnés, suivis de loin par le Tchad (4points) et le Gabon (1 point).
Le cas du Congo est intéressant par rapport aux autres pays, car la tendance haussière de ce pays entre 2019 et 2024, soit un gain de 4 points, montre, malgré le niveau encore bas, que les réformes dans le secteur de la lutte contre la corruption mises en œuvre par le Gouvernement au niveau des réformes juridiques et institutionnelles ont été une réussite. Comparativement, la Côte d’Ivoire, comme l’indique le rapport de Transparency International de 2024 a gagné 10 points au cours de la même période pour des efforts similaires à ceux entrepris par le Congo.
Les résultats du Congo auraient été davantage éloquents si, comme cela s’est fait en Tanzanie toutes les clameurs des faits de corruption étaient suivies des sanctions légales concluantes. Comme l’indique le Président de Transparency International, «la corruption aura de beaux jours devant elle tant que les systèmes judiciaires ne pourront pas sanctionner les actes répréhensibles et maintenir les gouvernements sous contrôle…».
Des percées dans ce sens donneraient à coup sûr au Congo de ne pas réduire à néant les efforts juridico institutionnels entrepris depuis le début des années 2020 et de placer le pays sur le chemin des bons élèves de la lutte anticorruption en Afrique ou à tout le moins dans la sous-région.
Germain LOUBOTA
Chef de Département de la Prévention, la Sensibilisation et la Communication
Haute Autorité de Lutte contre la Corruption.








