Depuis le 2 octobre 2023, l’O.m.s (Organisation mondiale de la santé) recommande un nouveau vaccin: le R21/Matrix-M, pour prévenir le paludisme chez l’enfant. Cette recommandation, qui fait suite aux conseils formulés par le Sage (Groupe stratégique consultatif d’experts sur la vaccination) et par le Mpag (Groupe consultatif sur la politique de lutte contre le paludisme) de l’O.m.s, a été approuvée par le directeur général, le docteur éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, à l’issue de sa réunion semestrielle ordinaire, tenue en septembre 2023.
Malgré des grands progrès, avec un grand bon de biotechnologies et les avancées de la recherche, la lutte contre le paludisme, maladie parasitaire due au moustique, l’anophèle femelle, qui provoque les infections les plus fréquentes et les plus graves dans les pays tropicaux et subtropicaux, se heurte à différents défis. En 2021, on a estimé à 247 millions le nombre de cas de paludisme et à 619.000 le nombre de décès imputables au paludisme dans le monde. La région africaine reste la plus touchée par le paludisme engendré par le plasmodium falciparum. On y enregistre, en effet, 95% des cas et 96% des décès dans le monde. Les enfants sont particulièrement vulnérables: près d’un demi-million d’enfants africains meurent du paludisme chaque année.
Le vaccin R21 est le deuxième vaccin antipaludique recommandé par l’O.m.s, après le vaccin R.t.s,S/AS01, que l’O.m.s avait recommandé en 2021. On a constaté que ces deux vaccins sont sûrs et permettent de prévenir efficacement le paludisme chez l’enfant. Administrés à grande échelle, ils devraient avoir un impact important en termes de santé publique. La recommandation actualisée de l’O.m.s sur le vaccin antipaludique R21 s’appuie sur les données probantes issues d’un essai clinique en cours et sur d’autres études, qui ont montré ce qui suit:
– une efficacité élevée, lorsque le vaccin est administré juste avant la haute saison. Le R21 permet de réduire de 75% le nombre des cas symptomatiques au cours des douze mois suivant l’administration d’une série de trois doses;
– une bonne efficacité, lorsque le vaccin est administré selon un calendrier basé sur l’âge: le vaccin a montré une bonne efficacité (66%) au cours des douze mois suivant l’administration des trois premières doses. Une quatrième dose administrée un an après la troisième permet de maintenir l’efficacité du vaccin.
– un fort impact: les estimations issues d’une modélisation mathématique indiquent que le vaccin R21 devrait avoir un fort impact en termes de santé publique dans un large éventail de contextes de transmission du paludisme, y compris lorsque celle-ci est faible.
– rapport coût-efficacité: le prix allant de 2 à 4 dollars américains par dose, le rapport coût-efficacité du vaccin R21 serait comparable à celui d’autres interventions antipaludiques recommandées et d’autres vaccins destinés aux enfants;
– similitude des vaccin R21 et R.t.s,S: ces deux vaccins recommandés par l’O.m.s n’ont pas été testés dans le cadre d’une étude comparative directe. A ce jour, rien n’indique qu’un vaccin donne de meilleurs résultats que l’autre;
– innocuité: les essais cliniques ont montré que le vaccin R21 est sûr. Cette surveillance va se poursuivre, comme pour les autres vaccins nouveaux.
Les vaccins antipaludiques doivent être administrés selon un schéma de quatre doses aux enfants à partir de l’âge de 5 mois (les programmes de vaccination peuvent décider d’administrer la première dose à un âge plus avancé ou légèrement plus précoce, en fonction de considération opérationnelles). Ces vaccins anti-paludiques agissent contre le plasmodium falciparum, le parasite du paludisme le plus meurtrier dans le monde et dont la prévalence est la plus forte en Afrique.
Le vaccin antipaludique R.t.s,S a été recommandé en octobre 2021, pour la première fois par l’O.m.s, pour prévenir le paludisme chez les enfants. Depuis 2019, près de 2 millions d’enfants ont été vaccinés au Ghana, au Kenya et au Malawi, dans le cadre du programme de mise en œuvre du vaccin contre le paludisme. L’introduction du vaccin antipaludique R.t.s,S dans les trois pays pilotes a eu un impact considérable, réduisant le nombre d’hospitalisations pédiatriques pour paludisme grave et sauvant des vies. On attend un impact similaire lorsque le vaccin R21 sera introduit dans des contextes similaires.
Le choix du vaccin à utiliser dans un pays doit se fonder sur les caractéristiques programmatiques, l’offre de vaccins et l’accessibilité économique des vaccins. La demande de vaccins antipaludiques est sans précèdent. Toutefois, la disponibilité du R.t.s,S est limitée. L’ajout du R21 à la liste des vaccins antipaludiques recommandés par l’O.m.s devrait se traduire par une offre suffisante de vaccins, au profit de tous les enfants vivant dans des zones où le paludisme constitue un risque pour la santé publique. Il s’agit de combler l’énorme écart entre l’offre et la demande, estime la doctoresse Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’O.m.s Afrique.
Au moins 28 pays d’Afrique prévoient d’introduire un vaccin antipaludique recommandé par l’O.m.s, dans le cadre de leurs programmes nationaux de vaccination. Gavi Alliance du vaccin a approuvé la fourniture d’un soutien technique et financier pour le déploiement de vaccins antipaludiques dans 18 pays. Le vaccin R.t.s,S sera déployé dans certains pays africains au début de 2024 et le R21 devrait être disponible pour les pays à la mi-2024. J’ose espérer que le Congo-Brazzaville est au rendez-vous de ces innovations, car, hélas, notre pays est bien en zone endémique, avec beaucoup de décès imputables au paludisme.
Dr Diaz Patrice
BADILA KOUENDOLO
Chef de pôle, chef de Service de Gériatrie;
Hôtel Dieu Groupe SOS Le Creusot France;
Spécialiste des maladies dégénératives;
Expert en gestion et politiques de santé.