Après deux mois de vacances politiques, Mathias Dzon, président de la plateforme de l’opposition extraparlementaire, A.r.d (Alliance pour la république et la démocratie), a organisé, jeudi 13 octobre 2022, à sa résidence du centre-ville de Brazzaville, une conférence de presse «articulée autour des problèmes chauds de l’actualité nationale» et diffusée en direct sur les réseaux sociaux, comme l’a présentée Elo Dacy. Selon le leader de l’A.r.d, «le pays va de mal en pis, alors que le baril de pétrole est évalué à plus de 100 dollars et que la production pétrolière est estimée à 350 mille barils par jour». L’opposant congolais pense que «le Congo se meurt du comportement prédateur et égoïste de ses dirigeants». Par sa conférence de presse, l’A.r.d a dressé un tableau encore plus sombre de la situation du pays.
Dans son mot liminaire lu par Lazare Douniama, l’A.r.d estime que «des violences urbaines et des crimes de sang sont commis quotidiennement. Il ne se passe plus un seul jour sans que la presse n’annonce la commission de braquage meurtriers perpétrés par des nervis du pouvoir».
«Du fait de cette recrudescence des violences urbaines exercées par des groupes violents instrumentalisés par le pouvoir, un vent de peur-panique souffle sur toutes les villes congolaises et tout particulièrement sur Brazzaville et Pointe-Noire. Au lieu de sévir contre les délinquants en col blanc, pourtant connus de lui, le pouvoir s’emploie à les couvrir», soutient l’opposition.
«Face au chaos actuel, l’Etat/P.c.t reste passif et impuissant. Le Président de la République lui-même passe le plus clair de son temps dans de coûteux voyages dans son village natal et à l’étranger, même lorsqu’il n’est pas invité, comme cela a été le cas, lors des obsèques de la Reine Elizabeth II. Cette balade impromptue en Angleterre a valu au Congo les railleries du journal français «Le Canard Enchaînés» qui, dans son numéro du mercredi 28 septembre 2022, s’est fendu d’un article caustique, intitulé «Le despote en carafe», article qui tourne en dérision le Chef de l’Etat congolais», avance l’A.r.d qui trouve que «le Congo n’est plus gouverné. Le gouvernement a disparu des radars. Il passe son temps, tantôt à festoyer, à discourir à longueur de journée, au lieu d’agir pour améliorer la qualité de vie des populations, à tenir de nombreuses réunions inutiles, tantôt à se réfugier dans l’incantation et la démagogie sociale», a-t-il expliqué.
Mathias Dzon et ses alliés ont aussi pointé le principal parti de la majorité qui a perdu, à ses yeux, toute initiative politique sur le pouvoir. «Toutefois, la victoire de l’appareil du P.c.t sur le Président de la République et son fils est une victoire à la Pyrrhus, car le Chef de l’Etat congolais continue de détenir la réalité du pouvoir politique qu’il exerce sans partage depuis 40 ans. Rien ne changera fondamentalement. Pour l’essentiel, ce sera toujours le fait du prince. Pour reprendre une formule consacrée, il s’agira d’un changement dans la continuité», a-t-il indiqué.
«Pendant ce temps, sur le plan économique et financier, le pays s’effondre chaque jour davantage. L’illiquidité de l’Etat, de l’économie et du système bancaire et financier se consolide. Les réserves internationales de change qui sont au plus bas niveau ne sont pas reconstituées, car les recettes d’exportation ne sont pas rapatriées», a-t-il fait savoir.
Clouant au pilori la gestion publique, l’A.r.d poursuit que «sur le plan social, la détresse des Congolais et des Congolais a atteint des cimes. Les paiements courants sont bloqués depuis belle lurette et les énormes arriérés des salaires dans les administrations décentralisées et déconcentrées, des bourses des étudiants, des pensions des retraités et autres dettes sociales continuent de s’accumuler. L’explosion des prix des denrées alimentaires de première nécessité se poursuit à une cadence affolante, impactant très négativement le pouvoir d’achat des populations», a-t-il souligné. «Il ne s’agit là que d’effet d’annonce, c’est-à-dire de la publicité mensongère, des vœux pieux, car dans la pratique, rien de tout cela n’a connu un début d’exécution. Il y a un fossé abyssal entre les déclarations ronflantes du gouvernement et la réalité sur le terrain. On peut, dès lors se demander, comment le gouvernement Makosso lutte-t-il contre l’envolée des prix des denrées alimentaires de base qui constitue, aujourd’hui, le souci majeur des ménages congolais et à quelles fins utilise-t-il les 128 milliards 300 millions de francs Cfa, prévus par le plan de résilience, pour lutter contre la crise alimentaire actuelle?», a-t-il poursuivi.
«Par ailleurs, malgré la cagnotte engrangée à la suite de la remontée des cours du baril de pétrole (près de 800 milliards de francs Cfa selon les chiffres officiels), le gouvernement ne fait absolument rien pour soulager les peines des populations. Jusqu’à ce jour, il n’a mis en œuvre aucun plan d’apurement de la dette intérieure sociale, alors que certains fonctionnaires accusent de nombreux mois, voire années d’arrières de salaires (68 mois, soit 5 ans et 8 mois pour les travailleurs de la mairie de Ouesso; 65 mois soit 5 ans et 5 mois pour les travailleurs des mairies de N’Kayi et de Dolisie; 16 mois soit 1 an et 4 mois pour les travailleurs de l’Hôpital de Loandjili à Pointe-Noire», a-t-il déclaré.
Répondant aux questions des journalistes, Mathias Dzon a déclaré que «chaque pays au monde à un modèle économique de développement. C’est à partir d’un modèle économique que l’on définit toutes les structures. A l’exception de Brazzaville et de Pointe-Noire, la quasi-totalité des Conseils départementaux ou communaux n’ont pas tenu leurs réunions statutaires, faute de crédits. Pour les mêmes motifs, leurs travailleurs accusent plusieurs mois d’arriérés de salaire (de 8 à 51 mois selon les cas). La responsabilité de cette situation pour le moins incompréhensible, incombe d’abord et avant tout au gouvernement qui ne met pas à leur disposition, les crédits votés par le Parlement dans le budget de l’Etat de l’année en cours. Uniquement préoccupés par la préservation coûte-que-coûte du pouvoir et des privilèges qu’il leur procure, les tenants de l’Etat/P.c.t se moquent éperdument des collectivités territoriales. Le Congo se meurt du comportement prédateur et égoïste de ses dirigeants. Sous le règne du Président Denis Sassou-Nguesso, le Congo est riche, mais les Congolais sont pauvres. La plus grande richesse côtoie la plus grande misère. Tout est pour les tenants du pouvoir, leurs proches, leurs partisans, leurs obligés et rien pour les autres et pour le peuple», a déclaré Mathias Dzon et tel et l’essentiel de sa conférence de presse marquant la rentrée politique de l’A.r.d.
Propos recueillis par
Chrysostome
FOUCK ZONZEKA