Ministère en charge des sports
Point de presse de Hugues Ngouélondélé
sur la suspension de la Fécofoot par la Fifa
La suspension de la Fécofoot (Fédération congolaise de football) par le secrétariat général de la Fifa (Fédération internationale de football association), le 6 février dernier, a conduit le ministre en charge des sports, Hugues Ngouélondélé, à réagir par un point de presse, lundi 10 février 2025, à son cabinet de travail, à Brazzaville. A la fin de son point de presse, il a répondu aux questions des journalistes et nous avons pris des extraits de ses réponses. Ci-après, l’intégralité du mot liminaire du ministre des sports.
Mesdames et Messieurs les représentants de la presse,
Le contexte particulier qui nous réunit, ce jour, porte sur la crise que traverse actuellement la Fédération congolaise de football (Fécofoot). En vous remerciant d’avoir répondu présent à ce point de presse, j’ose espérer qu’au terme de celui-ci, à la lumière de notre connaissance et perception de cette crise, chacun se fera une opinion. D’emblée, il me faut rappeler, comme l’indique «la loi portant code du sport», que l’Etat est garant du développement et de la promotion de la vie associative, dans le domaine du sport et des activités physiques.
L’Etat confie cette mission, par délégation de service public, aux fédérations sportives nationales y compris la Fécofoot. En ma qualité de ministre de tutelle, garant du service public des sports, il était donc impératif, compte-tenu de la gravité du moment, d’apporter des éléments d’informations à l’opinion publique nationale et particulièrement aux acteurs du football. Au-delà de l’opinion que pourrait se faire chacun d’entre nous, en réalité il est urgent et nécessaire, d’entrevoir une sortie de crise mais surtout d’examiner et de définir avec l’ensemble des acteurs du football, les meilleures perspectives possibles pour la gouvernance de cette discipline sportive.

Mesdames et Messieurs,
Comme vous le savez, depuis près d’un an, la Fédération congolaise de football (Fécofoot) est en proie à une crise profonde. En effet, le 9 juillet 2024, le Ministère dont j’ai la charge a été saisi d’une motion de défiance par courrier des présidents des clubs de Ligue 1, sur une situation de crise les opposant au Comité exécutif de la Fécofoot.
Soulignant, entre autres, dans leur motion de défiance, des soupçons de corruption et de matchs arrangés du championnat national, ces clubs de Ligue 1 retiraient leur confiance au Comité exécutif de la Fécofoot et suspendaient leur participation à la Coupe du Congo ainsi qu’aux activités futures organisées par la Fécofoot. Les soupçons de corruption sous-tendus par le contenu d’un enregistrement audio circulant sur les réseaux sociaux suggèrent une violation flagrante des codes d’éthique:
– de la Fédération internationale de football association (Fifa);
– et de la Confédération africaine de football (Caf).
Ces faits pourraient également constituer une violation des dispositions de la loi portant code du sport notamment en ses aspects relatifs à la lutte contre la corruption et la concussion. Plus généralement, ces faits sont de nature à sérieusement compromettre la crédibilité et l’intégrité de notre championnat national.
Mesdames et Messieurs,
Après cette motion de défiance, nous avons également été informé par courrier de la tenue d’une assemblée générale extraordinaire de la Fécofoot, le 25 septembre 2024. Au .cours de cette assemblée, il a été décidé, par la majorité des membres, de la révocation du Comité exécutif de la Fécofoot et de la mise en place d’une commission ad-hoc, chargée de la gestion des affaires courantes et de l’organisation d’une assemblée générale élective dans les 90 jours.
Ensuite, une contestation juridique des décisions de l’assemblée générale extraordinaire par le Comité exécutif a été portée devant le Tribunal arbitral du sport (Tas) et à ce jour l’affaire suit son cours.
Face à la gravité de ce conflit interne à la Fecofoot, le 14 octobre 2024, j’ai adressé un courrier au secrétaire général de la Caf, pour porter à sa connaissance la crise actuelle et lui signifier que, depuis quelques années, la Fecofoot est confrontée à des difficultés sérieuses de gouvernance qui ont conduit récemment aux tensions croissantes entre ses dirigeants et ses membres, clubs et autres associations sportives.
Par la même correspondance, j’invitais la Caf et la Fifa à effectuer le déplacement à Brazzaville pour analyser et trouver une solution à cette crise interne. Malheureusement, cette initiative comme d’autres n’ont pas rencontré un franc succès.

Mesdames et Messieurs, représentants de la presse,
Il y a quelques jours, en l’occurrence le 6 février 2025, nous apprenions que la Fédération internationale de football Association (Fifa) a officiellement notifié à la Fédération congolaise de football (Fecofoot) sa suspension jusqu’à nouvel ordre, assortie de conditions de levée de ladite suspension. Ce qui implique:
– la perte immédiate de tous les droits de membre pour la Fécofoot;
– l’interdiction pour nos équipes nationales et clubs affiliés de participer à toute compétition internationale sous l’égide de la Fifa et de la Confédération africaine de football (Caf);
– l’exclusion de la Fécofoot de tous les programmes de développement, de formation et d’assistance technique proposés par la Fifa et la Caf;
– la rupture totale des relations sportives entre la Fécofoot et les autres associations membres de la Fifa.
Cette suspension est une sanction sans précédent pour notre pays, qui affecte profondément nos joueurs, nos clubs, nos officiels techniques, nos supporteurs et donc l’ensemble de la communauté sportive nationale. Il est vrai que cette sanction est une lourde épreuve pour nous tous. Mais, ne pourrait-elle pas constituer une opportunité d’introspection et d’interrogation profonde? Ne devrait-elle pas aussi nous inviter à rompre définitivement avec les déviances du passé et bâtir une nouvelle gouvernance du football?
Mesdames et Messieurs,
La belle histoire de notre pays nous rappelle qu’en raison de la débâcle de l’équipe nationale de football «Congo Sport» à la Coupe d’Afrique des Nations (Can) de 1968 à Asmara, en Éthiopie, l’option d’une trêve volontaire avait été levée par le gouvernement.
Ainsi, pour améliorer les performances de l’équipe du Congo et mieux la préparer aux compétitions, les autorités de l’époque, à l’initiative de feu Henri Elendé ont pris la courageuse décision de faire l’impasse sur les éliminatoires de la Can 1970. Cette décision avait notamment permis à notre équipe nationale de se refonder et remporter la Can 1972 organisée à Yaoundé au Cameroun. Aujourd’hui, bien qu’il s’agisse d’un contexte de suspension de la Fécofoot par la Fifa, ne devrions-nous pas en tirer des leçons?
Par ailleurs, en évitant au mieux toutes formes d’ingérence, le Ministère dont j’ai la charge va résolument poursuivre ses efforts de médiation entre les parties en conflit notamment le Comité exécutif et la Commission ad hoc, pour rechercher les compromis nécessaires à la sortie de crise et à la levée de la suspension. L’avenir de notre football dépend de notre capacité collective à reconstruire sur des bases saines et durables.
C’est pourquoi, nous lançons un vif et pressant appel à l’ensemble des acteurs du football notamment les joueurs, les supporters, les dirigeants de clubs, les médias et les sponsors à se rassembler pour la relance du football congolais. Le temps n’est plus aux divisions ni aux intérêts partisans. Il est à l’action collective, à la responsabilité partagée et à la construction d’un avenir nouveau pour notre football. Je vous remercie de votre aimable attention.

Réaction aux questions des journalistes
Répondant aux questions des journalistes, le ministre Hugues Ngouélondélé a déclaré:
– «Le Congo est un pays souverain. Le football, il est d’abord congolais, quand le drapeau est souillé à l’international, c’est certainement pas le drapeau de la Caf qui est souillé, et certainement pas le drapeau de la Fifa qui est souillé. Mais, il y a des limites à tout. On aura certainement un compromis avec la Fifa et la Caf. Mais, nous n’allons pas nous compromettre. Un compromis oui! Compromission, non. Il ne sera pas question, face à la débâcle du football congolais, de protéger qui que ce soit. Je dis non. Si à ce moment-là, on doit rester vingt ans sans jouer, on restera vingt ans sans jouer.
Malgré cette crise dure pour le pays, l’Etat s’arrange toujours à mettre quelques moyens à la disposition de l’équipe nationale. Et c’est des fois beaucoup d’argent. Et c’est pour quel résultat?
C’est ça notre rôle, c’est faire en sorte que nos joueurs quittent Brazzaville pour aller jouer à l’étranger, voyageant dans de bonnes conditions, dormant dans de bonnes conditions et mangeant une nourriture équilibrée. C’est notre rôle et nous l’avons toujours fait. Quand vous voyez un joueur porter le maillot n°10 et un short n°6, ça ce n’est plus le problème du Ministère. Vous savez que les équipements, c’est pas nous. Et malgré tout, il est arrivé que le ministre puisse prendre en charge les maillots de l’équipe, simplement parce qu’à ce niveau-ci, il y avait des défaillances. Je parle de ma gouvernance au Ministère des sports.
Depuis 2017 à aujourd’hui, nous n’avons aucun résultat. Mais, si on met sur la balance l’argent dépensé, c’est triste pour le pays. Je dis bien, c’est triste pour le pays. On ne peut pas continuer comme ça. A ce moment-là, quand ça ne marche pas, on ne met pas la responsabilité sur le Ministère. Nous avons donné une délégation et cette délégation ne marche pas».
– «Depuis 2018 à aujourd’hui, quels sont les résultats du football congolais? C’est la question que je pose aux journalistes, faites vos recherches, et c’est qui, le responsable? Lorsque le championnat national, chez nous, ne marche pas, est-ce que le championnat national est organisé par le Ministère ou par la Fécofoot?
C’est pour ça je dis que le fait qu’il y ait cette suspension, nous devons l’utiliser comme une opportunité, pour remettre les compteurs à zéro et repartir sur de nouvelles bases. Et pour cela, c’est le monde du football qui doit prendre conscience. Au Ministère des sports, nous n’avons qu’une seule envie: c’est de voir le football de notre pays marcher et les autres fédérations avec».
– «Le tout, c’est d’avoir une Fécofoot qui joue son rôle, qui rehausse le drapeau de son pays. On ne parle pas de la Fifa, on parle d’une Nation et pour le cas actuel, c’est le Congo. Alors, c’est peut-être en parlant comme ça qu’on parlera d’une ingérence non? Je suis ministre des sports et je suis regardant sur ces faits-là, et je suis en même temps juge et j’observe et je juge. Le jugement que j’apporte là, il est totalement négatif depuis plusieurs années».