Nous avons déjà relevé le fait que la promesse gouvernementale de création de dix mille emplois dans le secteur public et de quatre-vingt-dix mille emplois dans le secteur privé au cours de cette année proclamée comme année de la jeunesse court le risque de revêtir un caractère démagogique, en raison d’un existant qui n’offre pas les conditions nécessaires à une telle évolution à court terme.
Nous avons déjà rappelé ce que tout le monde sait que la création d’emplois n’est que la résultante d’un dynamisme économique. Car, un emploi renvoie à la production d’un bien ou d’un service et donc aux conditions de production impliquant les conditions de travail et la rémunération du producteur. Nous sommes là en plein dans l’économie et mieux que nous, les économistes peuvent bien nous expliquer ces théorèmes de leur science.
Or, même si les crises sont maintenant derrière nous, notre économie est toujours dans la morosité. Sa nature n’a pas tellement changé, car elle s’appuie sur un seul vecteur, la rente pétrolière dont la gestion, du reste, a besoin de plus transparence, pour lever le lourd voile de préjugés qui pèse sur elle. Les autres secteurs -l’industrie, le tourisme, l’agriculture, l’artisanat, le transport, la production énergétique, l’économie numérique, l’enseignement, la santé, etc- souffrent du manque d’efficacité ou de réalisme des politiques de développement. Ce qui rend la diversification économique tant souhaitée comme un objectif difficile à réaliser.
Dans son mémorandum économique intitulé, «La voie de la prospérité pour la République du Congo: mettre en place les fondations de la diversification économique», publié en mars 2023, la Banque mondiale dresse un constat cinglant des faiblesses de notre économie: Le secteur pétrolier représente environ 42% du P.i.b (Produit intérieur brut), 80% des exportations et 60% des recettes intérieures. Mais, il n’emploie que 20% de la main-d’œuvre nationale. Le deuxième secteur d’activités économiques dans le pays est constitué par la production des services, mais qui ne contribuent qu’à 33% du P.i.b. Par contre, l’agriculture, la sylviculture et la pêche végètent à 6%. De même, le secteur manufacturier, essentiellement constitué par les petites entreprises, ne s’élève en moyenne qu’à 6,5% du P.i.b.
Le plus gros employeur du Congo, c’est le secteur informel qui absorbe 75% des actifs, et pour la plupart, ce sont des jeunes qui travaillent pour leur propre compte ou occupent des emplois à faible productivité et à faible rémunération.
Et la Banque mondiale poursuit son constat en affirmant que «le Congo affiche une productivité du travail plus faible et, de surcroît, en baisse, par rapport à des pays comparables. Ce qui limite sa croissance économique. La baisse de la productivité du travail entraîne un recul du revenu par habitant et une augmentation de la pauvreté. En 2021, 52% de la population vivait sous le seuil international de pauvreté (2,15 dollars par jour), contre un taux de 33% en 2014».
Pour avancer, il faut d’abord prendre conscience de notre réalité socio-économique. L’expansion du secteur informel est dû aux tracasseries administratives et autres. Raison pour laquelle les Congolais n’aiment pas déclarer leurs activités. La création de l’Agence pour la création des entreprises (A.c.p.c.e) en 2017 est une grande avancée, mais le gouvernement devait s’atteler à renforcer son assise à travers le pays et améliorer ses performances, s’il veut atteindre son objectif d’assurer «la migration de 70 mille unités commerciales du statut informel vers le secteur formel, avec une fiscalisation indolore et une protection effective contre la parafiscalite?».
Le gouvernement devrait avoir une bonne approche de collaboration avec le secteur privé national. La création du portefeuille du partenariat public-privé devrait permettre des initiatives comme la tenue d’un Forum national pour la promotion du partenariat public/privé, devant réunir les pouvoirs publics, la société civile et les opérateurs économiques congolais et expatriés, pour aborder les questions de développement socio-économique de notre pays.
Car, la création d’emplois n’est possible que dans un contexte de relance économique. Il faut donc sortir de la morosité actuelle, en luttant contre les goulots d’étranglement comme nous l’avons relevé dans notre précédent texte, suivant les exemples donnés par le Président de la République, lui-même, en s’attaquant au comportement véreux des policiers de la circulation routière et des huissiers de justice.
L’HORIZON AFRICAIN