On a entendu quelqu’un qui se veut être politique parler de voyage. Pour lui, le plus grand voyageur, c’est l’électricité, qui est toujours partie et qui revient. Il a ajouté l’eau. Il y a d’autres entités qui voyagent, physiques ou virtuelles, voire spirituelles. Certains voyagent pour découvrir le monde; d’autres voyagent à la découverte de la connaissance. D’autres encore, comme Diogène de Sinope, voyage à la recherche de l’Homme.
Bien évidemment, l’électricité et l’eau ne voyagent ni pour découvrir le monde, ni pour la connaissance. Mais, leurs voyagent nous renseignent sur l’homme. Ce sont ces voyages, comme celui de Diogène, qui nous renseigne sur les faiblesses des êtres humains, sur leur insouciance, leurs vices et leurs inaptitudes. Parce que lorsque l’eau et l’électricité vont et viennent, on peut dire que c’est leurs «corps» qui voyagent. Mais, l’identité de leur essence reste, à savoir, produits aléatoires de mauvaise qualité, dispensés par une gestion aléatoire du service public.
Dans la vie, voyager, c’est aussi une manière de créer une rupture avec l’ordre existant, avec le train-train habituel, pour renaître dans une nouvelle clarté. Le problème avec les voyages de l’eau et de l’électricité, c’est qu’elles reviennent de leurs voyages pires qu’elles n’étaient: aucun changement qualitatif; aucun changement quantitatif. Et les éphémères n’ont que les voyages de leurs lamentations à contempler à longueur de journées.
Faute d’éclairage public ou, plutôt, d’éclairage politique, c’est avec des lampes, comme Diogène, que les éphémères cherchent l’homme capable de réorienter les voyages de l’eau et de l’électricité vers les robinets et les luminaires. Parce que là où il y a l’eau et l’énergie, il y a l’activité, il y a la vie; parce que l’eau et l’énergie rythment les activités quotidiennes du genre humain. Priver le genre humain de l’eau et de l’électricité est une faute politique; parce que, à en croire Jean Goubert, «aujourd’hui, l’eau et l’énergie sont sorties du cadre technique, pour embrasser le champ du politique, de la citoyenneté, de l’avenir de la planète et de la gouvernance».
Prométhée